Dans la Haute-vallée de l'Aude, l'Inquisition renaîtrait-elle?
On croyait le temps ancien de l'Inquisition révolue. Au Moyen âge, la papauté instituait urbi et obi ce tribunal religieux. Il a éradiqué en Occitanie, en particulier dans les Corbières, par le feu, les fers et la torture le Catharisme, philosophie chrétienne qui déstabilisait l'omnipotente église de Rome et ses privilèges. Et voilà qu'un abbé de ce petit coin de l'Aude et son patron, l'évêque de Carcassonne, semblent prêts à remettre au goût du jour les flammes de l'Enfer pour les mécréants.
Depuis 16 ans, le Groupe d'études et de sauvegarde du patrimoine polyphonique espéranzais organise un festival dans les églises de ce pays. Au programme: des chants occitans issus de la tradition orale, exaltant la fraternité, le partage et l'amour. Sans pour cela gêner en aucune façon le culte catholique dans lesdites églises.
Mais voilà, par Jésus-Marie-Joseph, l'abbé Sévenou, titulaire d'une de ces paroisses, a exigé la liste des chants qui seront entonnés. Et le 10 juillet, le ci-devant Alain Planet, archevêque de l'Aude, s'est fendu d'un courrier circonstancié, menaçant les municipalités du Tribunal administratif, vu que les églises "sont affectées perpétuellement, gratuitement et exclusivement au culte catholique". Selon la loi de séparation des Eglises et de l'Etat de 1905, non de dieu!
Les maires désignés n'ont pas obéi aux injonctions du prélat de la papauté. Des catholiques se sont solidarisés avec l'élan républicain et laïque de leurs élus. Ils n'ont pas écouté l'ordre de l'abbé Sévenou qui incitait à récupérer l'unique clé de l'église de Nébias pour empêcher l'ouverture des portes. Et les chants polyphoniques occitans ont résonné partout.
Ils ont même résonné jusqu'au plus haut des cieux, m'a-t-on dit. En attendant bien sûr les tribunaux de l'Inquisition, pardon la saisine du Tribunal administratif.