De vent mauvais à l'issue de la réunion ministre des Transports-patrons de la SNCF
Mais comment aurait-il pu en être autrement? Le big boss de ce qui reste de la SNCF met en pratique la politique d'austérité décidée par les gouvernements, depuis Nicolas Sarkozy à aujourd'hui Emmanuel Macron, en passant par François Hollande. Et la ministre en titre des Transports fut directrice de la Stratégie à la SNCF et de ce fait membre de son Comité Exécutif. Bref, malgré les accidents et les graves dysfonctionnements en nombre, les patrons de la SNCF demeurent à leur place, la politique d'austérité est toujours dans leur feuille de route et des milliers d'emplois seront supprimés en 2018. On voudrait assassiner le rail public national en l'accusant de la rage, qu'on ne s'y prendrait pas autrement.
La mauvaise farce a assez duré!
Le 8 janvier 2018, le gouvernement convoque la direction SNCF pour ré entendre ce qu’il sait déjà, sans jamais remettre en cause la stratégie et la campagne anti ferroviaire qui se développe. Le vaudeville qui se joue sous nos yeux pourrait être risible s’il n’était pas si grave.
L’actuelle ministre des Transports, ex-directrice de la stratégie à la SNCF, feint d’ignorer les véritables raisons de la situation pourtant liées aux mauvais choix opérés depuis des années, y compris lorsqu’elle était membre du Comité Exécutif de la SNCF.
Les agitations médiatiques de la direction SNCF avec la complicité du gouvernement ne nous détourneront pas de l’urgence : maintenir le train public.
1. LE RETOUR A UNE ENTREPRISE PUBLIQUE, UNIQUE ET INTEGRÉE : LA SNCF
La réforme ferroviaire de 2014 a éclaté la SNCF en trois EPIC distincts : SNCF (EPIC de tête), SNCF Réseau, SNCF Mobilités. Elle a rendu plus complexe les relations entre les différents services de l’entreprise désormais séparés dans 3 entités. Elle n’a pas réunifié le gestionnaire de l’infrastructure (ex RFF) et le transporteur (la SNCF). En définitif, elle a accentué les difficultés qui existaient déjà au préalable. En outre, elle n’a pas réglé la question du financement et de la dette. Pourtant, en juin 2014, lorsque les cheminots ont cessé le travail afin d’imposer une autre réforme, ils étaient qualifiés d’irresponsables par le gouvernement d’alors.
2. REPRISE DE LA DETTE PAR L’ÉTAT
Les investissements de ces dernières décennies, notamment dans les LGV au détriment du réseau classique, ont été imposés par l’Etat à la SNCF. Il est inconcevable de vouloir faire supporter cette dette aux usagers et aux cheminots. Il convient cependant de ne pas opposer le réseau à grande vitesse au réseau classique, ils doivent être complémentaires.
Le poids de la dette est prétexte à la fermeture de gares, de lignes, de guichets, à la suppression massive d’emploi cheminot (+ de 2000 prévus en 2018), au recours massif à la sous traitance, entre autres.
En attendant, elle génère chaque année 1,7 milliards d’euros d’intérêts qui part directement dans la poche des banquiers.
3. MISSION SPINETTA : EN FINIR AVEC LE TRAIN PUBLIC ?
Les conclusions de la mission confiée à l’ex-PDG d’Air France seront sans surprise.
Elles auront vocation à justifier une nouvelle réforme du système ferroviaire public en stigmatisant au passage les cheminots, leur statut. C’est pourtant ce statut (existant avant la création de la SNCF) qui, malgré des contraintes fortes acceptées par les cheminots, garantit la continuité du service public, un haut niveau de formation et de technicité, une approche de la sécurité des circulations placée au dessus de tout le reste.
La CGT n’acceptera pas que les cheminotes et les cheminots soient les boucs émissaires de ceux qui ont décidé d’en finir avec la SNCF.
4. OUVERTURE À LA CONCURRENCE : LA SOLUTION À RIEN
L’ouverture à la concurrence relève au mieux de la malhonnêteté intellectuelle, au pire, d’une attitude irresponsable qui insulte l’avenir. Elle n’améliorera pas le quotidien de nos concitoyens, pire, elle ajoutera sur le réseau actuel des intervenants qui viendront compliquer une situation déjà bien difficile. On ne fait pas du train comme on vend des forfaits téléphones.
Le transport public de voyageurs comme celui des marchandises, à l’heure des grands défis sociaux et environnementaux, est résolument contemporain. Mieux, il est un maillon structurant du futur en termes de déplacements, d’aménagement du territoire, de réduction des gaz à effet de serre. Il est en outre un appui stratégique essentiel pour l’État, comme l’ensemble des services publics.
La Fédération CGT des cheminots a raison lorsqu’elle exige :
- Le retour à une entreprise publique, unique et intégrée : la SNCF, seule garante d’un fonctionnement cohérent de l’ensemble des services de l’entreprise.
- La reprise de la dette par l’État sans contrepartie et un financement public à la hauteur des enjeux futurs. Sans la maîtrise publique du chemin de fer par l’État, nous n’aurions jamais connu l’électrification des lignes, la grande vitesse etc ….
- L’arrêt immédiat des suppressions d’emploi et des embauches au Statut à la hauteur des exigences du service public ferroviaire.
- L’arrêt de la réduction de l’offre ferroviaire par le maintien, voire la réouverture de gares, de lignes, permettant à la SNCF de remplir ses missions de service public partout et pour tous.
- L’arrêt de toute velléité d’ouverture à la concurrence, contraire à l’intérêt général, à la réponse aux besoins des populations, au maintien du service public en tous points du territoire.
Aussi, la Fédération CGT appelle TOUS les cheminots, les associations d’usagers, les usagers eux-mêmes, ainsi que toutes celles et tous ceux qui souhaitent défendre un service public ferroviaire de qualité, à participer massivement à la manifestation nationale qui aura lieu le 8 février 2018 à Paris.
Note de ma pomme: La société nationale des chemins de fer fut créée par le gouvernement Front populaire par le décret du 31 juillet 1937, pour entrer en fonctionnement le 1er janvier 1938. Certes, ce ne fut pas la nationalisation revendiquée par la CGT, puisque jusqu'en 1982, les anciennes compagnies privées ferroviaires en furent actionnaires à 49%. Ce qui veut dire que jusqu'à cette date, elles engrangèrent du profit. Mais au fil des ans, par les luttes des cheminots avec le soutien actif des usagers, la SNCF fut un outil remarquable au service de la souveraineté nationale et reconnue internationalement pour sa technicité.
Mais durant des décennies était-ce à elle de financer entièrement les structures des lignes à grande vitesse imposées par l'Etat, au détriment du réseau classique, entraînant une dette de 43 milliards que supportent les usagers et les travailleurs du rail? Pourquoi les gouvernements de drauche et de droite ont-ils imposé que la SNCF devienne le 1er transporteur routier au détriment de la sécurité, de l'entretien des routes et augmentant ainsi la perte du trafic marchandise par le rail? Etc, etc.
Alors, il ne faut plus tergiverser et attendre, les bras croisés, un hypothétique changement de politique gouvernementale pour les prochaines présidentielles. Au sortir de la Deuxième Guerre mondiale, dans une France meurtrie, dévastée, pillée, la SNCF fut un facteur primordial du redressement national. Et dans le pays en ruine, la Sécurité sociale fut aussi créée. Il n'y a de luttes victorieuses que celles que l'on mène au présent et sans n'attendre rien de la politique politicienne des uns ou des autres.
A moins de préférer que cette première affiche officielle de la SNCF ne soit conservée que dans la poussière d'un musée éteint.