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Publié par Le Mantois et Partout ailleurs

Mon amie la cigale est revenue très bronzée de son séjour en Espagne. En plus, elle danse le flamenco comme pas une, castagnettes et claquettes à l'appui. Moi, j'aime bien, mais le village de Port-la-Nouvelle trouve qu'elle casse encore plus les oreilles qu'avant. Mais les gens sont méchants parfois. Elle est pourtant gentille cette cigale et elle raconte si bien des histoires. Tiens, en voilà une autre de mon amie.

L’HISTOIRE DE LA PETITE FEE

C’était une très vilaine petite fée, adepte plus volontiers de l’école buissonnière que de s'asseoir sagement en cours de magie. Elle était pourtant très douée, capable de faire tomber de la neige en été ou de glisser sur un rayon de soleil sans se brûler les ailes. Mais elle préférait partir pirouetter comme une folle dans le vent, au lieu de suivre les doctes enseignements de ses professeurs. Elle aurait donc pu être la meilleure de toutes ses sœurs, mais ne le fut pas. Elle obtint néanmoins son diplôme de fée, mais comme dernière de sa classe, il n’y avait plus trop de bonnes magiciennes en ce bas monde.

Le Maître du temps la relégua toutefois sur la plage de La Nouvelle: hormis l'été, elle était désertée par le genre humain.

Aussi, dès la mauvaise saison, quand le Cers ravageait le sable ou lorsque la Méditerranée l’inondait, la petite fée s’ennuya fort dans cet immense espace abandonné. Alors joua-t-elle bientôt à courir au milieu des chevaliers gambettes, ces minuscules échassiers qui s’égaillaient comme des fous le long du rivage languedocien.

Elle rentrait alors au pays des fées, trempée des pieds à la tête et ses ailes complètement ébouriffées, pour avoir pataugé toute la journée au bord de l’eau. Bien sûr, le Maître du temps la réprimandait sévèrement, car une bonne fée devait disposer d‘une autre posture et non ressembler à une souillon. Mais dès le lendemain, elle oubliait ces remontrances.

Puis elle grandit et devint une fort belle et jeune fée. Ce qui ne l’empêcha nullement de faire la folle avec ses amis les chevaliers gambettes. Et l’été, les mamans n’entendirent jamais pourquoi leurs progénitures établissaient des pâtés hauts comme s’ils édifiaient la muraille de Chine et qu’ils pirouettaient parfois dans les airs. A la grande damnation aussi du Maître du temps.

Un été, apparut sur la plage un bel estivant. La Nouvelle, station balnéaire cotée, en accueillait des ribambelles plus chaque année. C’était un jeune homme descendu du Nord dans le Midi pour les vacances. il avait l’allure d’un prince charmant, à faire pâmer toutes les jeunes filles.

Notre fée tomba sous ce même charme. On pouvait être immortelle et s’amouracher d’un qui ne l’était pas. Mais ce bellâtre fut très méchant avec notre petite fée. Car ce bellâtre enviait celle qui pouvait voler de ses propres ailes. « Quand je suis en ta compagnie, je crois avoir un hanneton à mes côtés. Ou bien alors, exauce que je puisse m’envoler dans les airs comme toi ! », lui ricana-t-il un jour.

 

Mais depuis Icare, le Maître du temps interdisait formellement d’accorder à un être humain le droit de voler. Et il gronda sévèrement la fée qui était follement amoureuse d’un qui n’était pas galant pour deux sous.

« Si je ne puis faire qu’il soit l’égal d’un oiseau, je vais donc supprimer mes ailes et être comme ceux du genre humain, s’entêta cette dernière. N’en ai-je pas le pouvoir ? » Ainsi fut dit et ainsi fut fait.

Or tout le monde le sait, les bonnes fées ne sont pas plus hautes que trois pommes. Et sans cet attribut magique leur permettant de voler, elles n’intéressent plus personne. Les enfants ignorèrent donc cette toute petite et insignifiante chose. Et parce qu’il ne put jamais sillonner les airs, le beau damoiseau ne lui parla plus du tout.

 

L’été s’acheva, la plage se dépeupla et le prince charmant partit ailleurs à tout jamais. Les chevaliers gambettes reprirent leur course effrénée au bord de l’eau. Mais une petite fée, sans ses ailes, ne put jamais suivre leur train. Car même une magicienne ne peut remettre en place ce qu’elle avait détruit par pure bêtise. Alors erra-t-elle, l’âme en peine de l’aube jusqu’à la tombée du jour.

Un soir, des cormorans survolèrent la plage. Ils partaient nicher pour la nuit dans les salins de Sainte-Lucie. L’un d’eux aperçut un petit bout de chose qui semblait frétiller comme un poisson. Il plongea sur cette proie et la goba toute crue.

-Et c'est tout, dis-je fermement à mon amie la cigale qui, sans me répondre, s'envola peut-être pour toujours.

J'ai pesté: "Macarel, il y a toujours dans la vie, des fées pour les bonnes choses, cela est de tous les temps!"

Et sur ce, mes yeux s'écarquillèrent. Mon regard découvrit un reflet étincelant sous le soleil.  J’accourus donc vers ce que je pris pour une petite fée.

Mais ce ne fut qu’une vieille canette qui m’avait ébloui comme un miroir aux alouettes.

 

Il reste une fée

 

Il reste une fée

Au creux de la garrigue

Entre la farigoule et le serpolet.

Nul ne sait qu’elle existe

Et la moindre voix l’effraie

Plus encore le bruit d’un moteur carnassier.

Elle est douce et timide

Et comme la fleur de l’iris sauvage

Petite et très fragile.

Un jour

Un pas pressé l’écrasera

Sans s’en apercevoir.

Que voulez-vous

Les regards et les cœurs

Se tournent vers l’horizon vide

Grands ouverts.

 

La fada*

Demora una fada

Al bornhut de la garriga

Entre la farigola et lo serpol.

Degun no sabe que existis

E la mendre votz la esglacia

Mai encara lo brutch dal motor carnasier.

Es doça e timida

E coma la flor de la espasa salvatja

Petita e fragila.

Un jorn

Un pas pressat la esclafarà

Sens s’en apercebre.

Que vouleu

Los regards et los cors

Se tournan cap al orizont vuèg

Grands oberts.

 

 

La fada*, la fée (prononcez fado).

Le mot fada est la francisation de l'occitan fadat du verbe fadar (ensorceler).

 

Si vous désirez chanter dans la langue de la vieille province, sachez que le e se dit é et il est accentué pour être plus tonique. Quant au è, il se chante ê.

Sachez aussi que le v se prononce b, le o ou, que le a terminant un mot se dit o, sauf le à qui reste a. Enfin, le u se prononce ou après une voyelle ou au commencement d'un mot. Le s ou le z en terminaison se sifflent.

Allez, essayer c'est l'adopter.

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C
Bonjour Roger,<br /> <br /> Parler de fée pour un troubadour, c'est très seyant et tu réussis bien là ton exercice. J'ai adoré ton poème, tu peux faire pâlir d'envie certains(es) poètes(sses) qui se la pètent sans pour autant faire ma langue de vipère.<br /> C'est vrai que la cigale nous raconte souvent des histoires qui se terminent tristement mais en y réfléchissant la vie ne nous donne pas si souvent d'occasions de nous réjouir quand on vit à fond pour réaliser ses souhaits et mettre en application ses valeurs.<br /> <br /> Pour l'occitan, c'est corsé l'air de rien de se rappeler de toutes ses différentes prononciations. J'ai pensé que la fée était fada mais comme tu nous dit que cela se prononce fado, est-ce que le chant des portugais à quelque chose à voir avec l'occitan ? <br /> <br /> Amitiés féériques alors<br /> <br /> caro
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R
Le fado et la fada n'ont rien à voir, malgré que le portugais et l'occitan soient deux langues cousines latines. La cigale s'étant envolée, très bientôt, dans Corbières éternelles, sur les ailes du Cers, ce vent qui rend fada -dit-on- los estrangièrs (ceux qui ne seraient pas du pays). Mais c'est à voir bien sûr...
S
beaucoup de thèmes dans cette histoire, une histoire d'amour romantique entre deux êtres que tout sépare et ce n'est pas pure bêtise que la fée renonce à ses ailes mais par amour, cela existe souvent dans le quotidien des humains<br /> et puis ce poème magique sur la fée ,et celui là vaut son pesant d'or<br /> enfin un la traduction en occitan, une langue chantante même si les vers n'en ont pas besoin<br /> continuez troubadour colombier pour notre plaisir
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R
Après les contes de mon amie la cigale, sur les ailes du Cers, très bientôt...