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Publié par Le Mantois et Partout ailleurs

Mon article L'Egypte: ni l'armée ni la charia a suscité des commentaires. J'ai fait paraître hier sur mon blog l'expression de Gilbert Dubant. Canaille le Rouge s'est montré "dubitatif"  à son propos. Pour le débat, il met en ligne ses idées que je publie aujourd'hui:

Egypte, un canal historique, une histoire coloniale

Les chars déployée en Egypte. Ceux là sont anglais à Port saîd, les français (AMX 13) sont non loin à Suez. Les frères musulmans sont dans les soutes.

 

Après avoir donné un point de vue fort pertinent sur la situation en Egypte, l’ami Roger, ce qui est tout à son honneur, donne la parole à un militant francilien de la CGT qui apporte son point de vue le-blog-de-roger-colombier/pour-voir-plus-clair-en-egypte-par-gilbert-dubant.

 

Beaucoup de choses intéressantes dans son propos, mais des affirmations qui sont soit limitées soit contrariées par des raccourcis qui n’aident pas à clarifier le débat.

 

Le moindre n’étant pas l’impasse fait sur la réalité coloniale de l’Egypte à partir de l’effondrement de l’empire ottoman et le rôle de la France et de la Grande Bretagne pour asservir le peuple Egyptien. Un peuple qui, parmi les premiers, a su se doter d’un syndicalisme fort et conjonction avec un mouvement intellectuel laïc et démocratique puissant, d’un courant révolutionnaire communisant très actif dont Henri Curiel (assassiné à Paris dans les années 70 par la conjonction de la réaction égyptienne et les barbouzes du colonialisme français) est une des figures majeures et pas uniques.

 

Le postulat du chapeau de l’article « il faut utiliser un autre logiciel que la « démocratie » électorale comme seul garant d’une vie sociale sans mort violente. Il faut aussi constater que la vie humaine n’a pas la même valeur citoyenne partout. La maîtrise d’un logiciel culturel est affaire d’éducation. » Il permet de cadrer le débat.

 

Circonscrire au pays de la rive sud et est de la Méditerranée l’absence d’un logiciel politique pour décoder est déjà plus que rapide. Sinon, comment expliquer Franco, Salazar, les colonels Grecs ou l’opération « Glavio » (le glaive) initiée par L’Otan et  l’extrême droite italienne dans les années 70. Ou l'Amérique du sud. La vie humaine avaient-elle à la gare de Bologne ou de Santiago une autre valeur que dans les rue du Caire ?

 

Affaire d’éducation, dit G Dubant. Les dirigeants de frères musulmans sortent tous des mêmes universités américaines et ont donc  la même éducation que les rejetons de Rockefeller, de la famille Ben Laden ou des jeunes pousses types pigeonneaux agressifs d’Auteuil-Neuilly-Passy: les écoles du capital et cerise sur ce gâteau économique, ils apprennent leurs bases religieuse dans le même livre au point que le chemin des fondamentalismes se tressent une orientation partagée (voir les propos de Boutin concernant Nelson Mandela).

 

L’Egypte, comme beaucoup de pays colonisés, verra s’affronter une bourgeoisie compradores inféodée au capital colonial et celle issue de la rente coloniale et féodale arrimée au fondamentalisme religieux comme vecteur de son implantation et de conquête du pouvoir. Au-delà d’un parcours différencié lié aux liens avec le pouvoir colonial, la convergence des intérêts de classe permettra à ces deux bourgeoisies antagoniques mais rassemblée par la peur de la subversion populaire autour des enjeux du Canal de se répartir les rôles.

 

L’analyse de G. Dubant sur la place de l’armée concernant cette question est là globalement pertinente. Le même examen concernant la répartition des tâches pour occuper le terrain social par la charité contre les solidarités militantes qui construisent l’esprit de classe étant lieu de différence de forme mais de convergence de fond est à faire. Cette absence ne permet pas de comprendre les raisons de l’implantation des FM parmi les populations souvent les plus démunies ni la réalité de masse, la composition des cortèges dont la place du syndicalisme dans les manifestations anti-Morsi de fin juin.

 

Concernant le rôle historique de l’armée Egyptienne, il semble pour le moins hasardeux de mettre Nasser au même rang et niveau que Sadate et Moubarak, un peu comme si Fabien et Rol Tanguy étaient présentés comme les porte greffe d’Aussarès ou Massu ou les FTP comme pères des paras de Bigeard.

 

D’ailleurs et c’est peut-être là ou l’analyse de G. Dubant est la plus vulnérable, si les Frères Musulmans sont créés en 1928, n’oublions pas que la France et la Grande Bretagne, dès 1952, leur octroient subside et reconnaissance pour combattre la jeune république égyptienne qui vient de se créer en chassant Farouk, pantin au main des colonialistes et des USA et, crime insupportable, qui décide de nationaliser le Canal de Suez en privant le capital financier d’une de ses principales rentes internationales. Le gouvernement Guy Mollet (déjà la SFIO) est à l’initiative d’une opération militaire qui finira comme un fiasco mais mettra en place les termes des accords entre Israël qui, dès 1956, passera du statut de création (discutable) par l’ONU d’un foyer qui deviendra de plus sioniste à ce porte avion de l’impérialisme. Voilà la porte d’entrée des USA tenue fermée par Nasser qui, dès sa disparition, sera forcée de l’intérieur par l’état-major égyptien.

 

Dans ce cadre, rapporter la question à une incapacité à lire la réalité d’un pays à base musulmane alors que l’Egypte historiquement (même sous l’empire Ottoman) est un carrefour de tolérance culturelle est aller un peu vite en besogne. C’est oublier d’une part, quel que soit le nombre (à discuter) de pétitionnaires, la nature impressionnante de la masse du rejet populaire du pouvoir de Morsi, la réalité de la mise en place par le même d’une dictature de type fasciste au bilan caché par ceux qui défendent la légitimité de Morsi avec un attachement au légalisme qu’il n’ont pas pour le régime d’Assad, les progressistes des deux pays étant toujours la base d’ajustement par charniers interposés des comparaisons éventuelles.

 

C’est quelques part ignorer les enseignements de l’histoire qui montre plus au nord sur les bords du Bosphore comment l’impérialisme sait manœuvre entre islamistes et militaires contre les démocrates turques. Il ne s’agit pas que d’enjeu de pouvoir politique mais bien de la façon dont celui-ci garantie la maitrise de levier économique (d’accord avec G. Dubant pour, concernant l’Egypte, la question du canal comme dans le Maghreb celle des gisements de minéraux et pétroliers ou la rente de l’Opium plus vers l’orient). Et donc l’analyse de pêcher par une non prise en compte à leur place fondamentale des enjeux de classe. C’est dommage de la part d’un militant de la CGT.

 

Je partage d’autant plus la conclusion de Roger et son rappel fort à propos du rôle de la religion dans l’analyse de Marx.

 

Pour aider à se faire une idée de ce qui se passe au Caire, sans être obligé de décoder les circonlocutions de la presse occidentale, voici le lien avec le blog de D. Bleitrach. Ses correspondants lui passent des informations précieuses. Des avis à entendre.

 

A vous de juger : histoireetsociete-2013/08/18/la-verite-sur-ce-qui-se-passe-en-Egypte-encore-un-temoignage/

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