Prothèses mammaires PIP: le silence était d'or
Dans ce scandale sanitaire et donc humain qui grossit chaque jour davantage, scandale doublé d'une escroquerie financière, chacun des protagonistes ouvre son parapluie. Cet article fait suite à celui d'hier à ce sujet.
La société PIP incriminée, par la voix de son avocat, affirme que tout cela est inhérent au système capitaliste. Dont acte, hélas.
L'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (l'intitulé entier de cet organisme d'Etat informe mieux que le sigle Afssaps ) joue elle au chevalier blanc. Elle se donne, ni plus ni moins, le beau rôle d'avoir découvert l'arnaque. En fait, comme le confirme l'article de Brigitte Rossigneux dans le Canard enchaîné, l'Agence française a été indolente dans cette affaire. Sa dernière grande enquête remonte à 2001 et ses agents n'ont rien détecté chez PIP ou ailleurs. Pourtant, au palmarès des signalements adressés à l'Afssaps (8 000 environ par an), les prothèses mammaires arrivent en deuxième position derrière les appareils à perfusion. Fin 2008, un chirurgien de Marseille tire lui la sonnette d'alarme. Mais ce n'est que 18 mois après, le 16 mars 2010 exactement, que l'Afssaps "effectue une enquête approfondie" communique-t-elle. Faux, en vérité, un salarié en délicatesse avec son employeur (PIP) a balancé l'emploi de silicone à usage industriel et non médical.
L'Agence française de sécurité sanitaire ne dispose que de 6 inspecteurs pour toute la France. Il est clair que la réduction des budgets publics la concernent. Et une prothèse PIP ne coûte-t-elle pas moins cher à la Sécu en déficience budgétaire elle aussi? Et ne pas oublier que cette même Afssaps est très critiquée dans dans sa passivité face au scandale du Médiator des laboratoires Servier.
La TÜV Rheinland, société allemande de vérification et de certification, se dit totalement indépendante. Mais c'est une entreprise privée, à but lucratif. Son site internet (en français) signale un bénéfice de 1, 1 milliards d'euros en 2010, avec 40% de son chiffre d'affaire hors d'Allemagne. Elle certifie les prothèses mammaires, autant que (entre autres) les contrôles techniques automobiles ou les appareils ménagers: Brrr.
Elle s'est fendue d'un communiqué en date du 10 février 2011. Elle y annonce avoir suspendu la certification de PIP le 26 mars 2010, soit 10 jours après l'action de l'Afssaps. Elle affirme aussi avoir été totalement blousée par PIP, car sa mission réglementaire ne concerne pas "l'examen du produit par le fabricant de l'implant lui-même". Comme si on accolait CE sur l'étiquette d'un bordeaux bouché, alors que le flacon contient du vinaigre. Re- Brrr.
Quant aux chirurgiens plasticiens, hormis celui de Marseille en 2008, sont-ils aussi blancs que neige? Ils opèrent à plus de 80% dans des cliniques privées, avec sans doute de lucratifs dépassements d'honoraires. Ils s'insurgent contre d'éventuelles attaques les concernant, puisque jamais ils ne sont informés de la prothèse qu'ils implantent. Re-Re-Brrr. Un avocat de plaignantes les pointe malgré tout du doigt pour grave "manquement au devoir information" de leurs patientes. Cet avocat affirme qu'ils ne pouvaient pas ignorer la fragilité des implants mammaires PIP, quand certains ont continué à réopérer des femmes avec toujours des prothèses PIP, malgré des précédentes ruptures.
Dernière Chose, TÜV Rheinland, sur son site internet français, souhaite de "Bonnes Fêtes". Et ça, au moins, cela ne mange pas de pain!