Les chiens de Dieu
C'est en Hongrie que cela se passe, état de l'Union européenne qui en a assuré la présidence du 1er janvier au 30 juin 2011. Oui, cela se passe sur notre vieux continent et pas sur un autre où les cinglés du coran sévissent, ou bien en Israël quand les fous de la torah obligent les femmes à monter à l'arrière dans les transports en commun, les mêmes ayant des postes ministériels. L'intégrisme religieux, où qu'il morde, est liberticide et l'histoire, toute de sang vêtue, démontre qu'aucune émancipation des peuples ne fut obtenue sous le doigt de Dieu.
Certes, cette nouvelle Hongrie, que sa nouvelle Constitution proclame "éternelle et chrétienne" n'est pas gouvernée par la monstrueuse Inquisition toute chargée d'instruments de tortures pour réduire l'homme à l'état de bête. Mais la Hongrie, c'est l'Europe, celle que la Résistance appelait de ses voeux pour qu'elle soit libre et démocratique le 8 mai 1945, celle que nous devions construire aussi comme un Éden de tolérance et de solidarité sous l'égide d'un Marché unique. Et puis voilà, le capitalisme a fait des rêves son affaire et affermit plus sa dictature. Avec la spéculation et la crise, les riches sont devenus plus conquérants, tandis que les peuples se sont appauvris de jour en jour. Jusqu'aux élections législatives de 2010, les sociaux-démocrates gouvernaient la Hongrie. Mais au lieu d'une politique de gauche, les programmes antilibéraux se sont succédés, entremêlés de corruptions au plus niveau des institutions. Dès lors, le marasme économique et social s'est accru et les Hongrois, sans plus aucune boussole, s'en sont retournés ailleurs: majorité absolue des ultra conservateurs du Fidesz au Parlement et succès de l'extrême-droite qui compte 47 députés contre 0 auparavant. Oui, dans le désastre social et la misère humaine, la bête immonde a ressurgi de sa basse-fosse au nom de la race et du Christ. Et au nom de la religion aussi, les ultra conservateurs marchent pour sauver la patrie, le crucifix à la bretelle, comme un soldat porte son fusil chargé.
Depuis le premier janvier 2012, une nouvelle constitution est appliquée, portée par le Fidesz qui a obtenu 53% des suffrages aux législatives. Désormais, la Hongrie n'est plus une république et toute référence à ce mot a disparu du texte constitutionnel. La place de la République, à Budapest, la capitale, a été rebaptisée Jean-Paul II. Dans la Constitution, "Dieu bénit les Hongrois" et protège la vie "dès sa conception". Que va-t-il en être de l'IVG et de ceux qui n'adhèrent pas à cette nouvelle "Hongrie éternelle et chrétienne"?
La loi fondamentale du pays a été validée par une assemblée à la botte du Fidesz, sans référendum, puisque d'essence divine. Et même si une autre majorité arrivait un jour au pouvoir, à moins d'une révolution, elle ne pourrait pas réformer cette constitution liberticide et réactionnaire, vu la majorité de blocage (inséré dans le texte constitutionnel) qui l'interdit.
Pour remercier ses soutiens (et vous devinerez lesquels), le Fidesz a gravé dans la Constitution la fin de la progressivité de l'impôt: 16% pour tout le monde, riches et pauvres. Et il laisse faire les exactions contre la minorité Rom sédentarisée et originaire de Hongrie, comme les parades des milices fascistes en uniforme et au pas de l'oie. Sous prétexte de religion et d'identité hongroise, la caporalisation des esprits a débuté: licenciements du directeur de l'Opéra de Budapest et de nombreux dirigeants de théâtres dans le pays, création d'une "direction de l'information centralisée" pour soutenir les racines hongroises promulguées dans la Constitution, laquelle censure les médias ou supprime la fréquence des radios, telle Kilubradio gommée des ondes pour ne pas diffuser assez de "musique et de culture hongroise".
Tout cela se passe en Europe, dans l'indifférence générale. Il est vrai que Victor Orban, le premier ministre de cette Hongrie-là, est aussi vice-président du Parti populaire européen, majoritaire à l'Assemblée européenne, groupe politique comprenant aussi l'UMP de Sarkozy et la CDU de Merkel.
Au fait, que pense notre chanoine d'honneur de Latran de cette Hongrie aux valeurs très chrétiennes. Qu'en dit Nicolas Paul Stéphane Sarközy de Nagy-Bosca (dit Sarkozy), fils d'un immigré d'origine hongroise?
Que l'on se comprenne bien, mes amis et mes camarades croyants restent mes amis et mes camarades. j'ai foi en eux parce qu'ils se lèveront toujours pour défendre la liberté et la démocratie. Mais je hais profondément tous les chiens de Dieu qui, de par le monde, torturent les consciences et emprisonnent toujours la liberté.
Et parce que j'ai l'espoir au coeur d'un monde plus juste et meilleur, avec les croyants et ceux qui ne le sont pas, j'ai relu le poème qu'a écrit Aragon dans la clandestinité et sous l'Occupation. La Rose et le Réséda honore l'héroïsme d'hommes, aux convictions personnelles opposées, qui tombèrent ensemble pour une France libre (la belle dans le poème). Aragon va dédicacer ces vers admirables à Gabriel Péri et à Estienne d'Orves, comme à Guy Môquet et à Gilbert Dru, deux communistes et deux catholiques, quatre résistants fusillés par les soldats allemands.
Extraits:
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n'y croyait pas
Tous deux adoraient la belle
Prisonnière des soldats (...)
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n'y croyait pas
Un rebelle est un rebelle
Nos sanglots font un seul glas (...)
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n'y croyait pas
Répétant le nom de celle
Qu'aucun des deux ne trompa
Et leur sang rouge ruisselle
Même couleur même éclat (...)
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n'y croyait pas
L'un court et l'autre a des ailes
De Bretagne ou du Jura
Et framboise ou mirabelle
Le grillon rechantera
Dites flûte ou violoncelle
Le double amour qui brûla
L'alouette ou l'hirondelle
La rose et le réséda.