1939: Billie Holiday plante l'arbre de l'émancipation des Afro-américains
16 ans avant Rosa Parks, la femme noire qui ne céda pas sa place de bus à un blanc, violant ainsi la loi de ségrégation raciale américaine, Billie Holiday chante Strange fruit.
C'est Abel Meeropol qui en a écrit les paroles. Cet enseignant juif membre du Parti communiste américain, habitant le Bronx, rend hommage aux noirs lynchés sans jugement aucun dans les états du Sud selon le loi "Lynch". Le poème exhibe à la face de l'Amérique et du monde le visage hideux du Ku Khu Klan et du racisme institutionnel.
Les arbres du Sud portent un étrange fruit,
Du sang sur les feuilles et du sang aux racines,
Un corps noir qui se balance dans la brise du Sud,
Étrange fruit suspendu aux peupliers.
Scène pastorale du valeureux Sud,
Les yeux exorbités et la bouche tordue,
Parfum de magnolia doux et frais,
Puis l'odeur soudaine de chair brûlante !
C'est un fruit que les corbeaux cueillent,
Que la pluie rassemble, que le vent aspire
Que le soleil pourrit, que les arbres lâchent
C'est là une étrange et amère récolte.
Aussitôt, les mots du poète dérangent et aucune radio américaine ne diffusera Stange fruit, "Fruits étranges".
Mais cette chanson accompagnera la légende et les concerts de Billie Holiday jusqu'à sa mort le 17 juillet 1959, rongée par l'alcool et la drogue.