Chez Castorama, c'est castoche de casser les syndicats
Dans un manuel révélé par l’Humanité, l’enseigne de bricolage, à la pointe du combat patronal pour le travail du dimanche, apprend à ses dirigeants à « marginaliser » les syndicalistes.
Quand elles ne mettent pas en scène la mobilisation des «vrais» salariés qui, malgré le Code du travail, voudraient tant avoir la liberté chérie de travailler le dimanche, les grandes enseignes du bricolage passent leur temps du lundi au samedi à contrecarrer l’implantation syndicale dans leurs magasins. Dans un diaporama que l’Humanité révèle (voir le document sur son site, notamment à partir de la page 30), Castorama détaille une série de consignes édifiantes pour ses cadres dirigeants, encouragés à opposer la «représentativité salariale» à la représentativité syndicale: au premier tour des élections professionnelles, il faut, indique le manuel, «inciter à l’abstention» afin de faire perdre aux organisations syndicales leur monopole en matière de représentation et, permettre à des candidats «sans étiquette» de se présenter au second tour.
Piloter des suffrages
Mais attention, ajoutent les Machiavel de Castorama, «moins il y aura de suffrages valablement exprimés, plus le délégué syndical aura la chance d’atteindre les 10% qui lui permettront de garder son mandat (seuil de représentativité): il faudrait piloter suffisamment de suffrages exprimés sur une organisation syndicale pour mettre en délicatesse une autre, mais ne pas dépasser la moitié des inscrits pour ne pas réaliser le quorum. Ainsi, on écarte une organisation syndicale et on en légitime une autre ». Les dirigeants de magasins sont encore appelés à «affaiblir la capacité électorale», «soutenir le cas échéant le CE en place», «identifier une liste alliée», «marginaliser les organisations syndicales», etc.
Devant cette pièce datant de 2010, Jean-Paul Gathier, délégué central FO, s’est mis en tête de demander des explications à la direction de Castorama au mois de juin dernier. Le syndicaliste les attend encore, mais il assure: «Pour la direction, les élections doivent servir à contrer les délégués qui les embêtent et à limiter l’influence syndicale. Ce type de pratiques perdure, les syndicalistes les voient à l’œuvre dans tout le pays…»