Hé, Sarkozy, et la fraude fiscale?
Un oubli d'importance pour le président-candidat, surtout à se prétendre celui du peuple qui lui trime durement sur la mère-patrie: l'évasion fiscale. Et sur toutes les chaînes de télé où Nicolas Sarkozy s'installe avec complaisance, on oublie aussi de le questionner sur ce sujet. Pourtant, celui qui fut son ministre du Budget, j'ai nommé Eric Woerth, avait brandi devant les caméras une feuille de 3 000 noms, promettant les feux de l'enfer sur ces mauvais contribuables français exilés hors de la mère-patrie. On allait mettre les agents du fisc dans leurs pattes (du moins ceux que la coupe sombre dans la fonction publique avait épargné) et un sang impur allait abreuver nos sillons (du moins aurait renforcé le trésor public). Et puis, plus rien, comme si les 3 000 fraudeurs n'avaient jamais existé. Bon, c'est vrai, monsieur Woerth avait d'autres soucis avec l'ex-patronne de son épouse, ou avec un golf et un hippodrome, ce qui le fit barrer du gouvernement des privilégiés qui voulait rester plus blanc que neige (le regard fixé sur la réélection de celui qui le faisait vivre depuis l'Elysée et son cercle de potes du CAC 40).
Alors, on a allumé des contre-feux. Haro contre les assistés sociaux: ce fut Laurent Wauquiez, descendant de gros industriels et ministre en exercice qui s'y colla le premier. Il eut un prompt renfort de Le Pen fille qui y ajouta sa touche culturelle en ce qui concerne les immigrés venant croquer le peu qu'on donne aux gaulois de souche. Claude Guéant, chef de la police et de la bonne civilisation qu'il faut à la France, de renchérir. Il n'eut pas trop à forcer: le conseiller en communication de l'Elysée n'est autre qu'un ex-journaliste de Minute, feuille de l'extrême-droite qui ouvrit ses colonnes à Mariani, ministre des Transports de la République française. Un pincée de halal, un quota par-ci, la délinquance roumaine par-là, plus d'autres horreurs xénophobes, la boucle était bouclée et l'artillerie lourde pouvait tonner.
Oui, mais la fraude fiscale, les 3 000 noms de Woerth, où en est le gouvernement, aurait dû s'interroger la presse libre et non faussée. Non, Nicolas Sarkozy proposait que l'on disserte sur la fraude sociale, celle qui, pillant les finances publiques, est responsable de nos malheurs. Et dans tout l'hexagone, les députés UMP s'attelèrent à battre les estrades pour cela. A Mantes-la-Jolie, la député sortante, Cécile Dumoulin, se fit aider par un autre député sortant, lui de la Droite populaire (l'extrême-droite de l'UMP, c'est dire). Et tout un bazar de mensonges d'être mis sur la place publique: les cartes vitale louées à l'année, des zigues touchant 40 fois le RSA (au risque de se faire imposer à l'ISF?), toute une équipe de foot touchant l'allocation d'adulte handicapé (pas celle du PSG), les Chinois qui ne meurent pas dans le 11e arrondissement de Paris pour que la famille palpe les allocations, jusqu'aux profs absents tout le mois de mai pour cause de ponts et d'arrêts maladie... Du grand guignol, quoi!
Pendant ce temps, le produit de l'impôt sur les sociétés dégringole en France, d'après les sources du ministère des Finances: 50,8 milliards en 2007 pour 39,1 en 2011, alors que les profits du CAC 40 ont explosé. Pendant ce temps, les exilés fiscaux français se repaissent en Suisse, au Luxembourg ou en Belgique pour ne citer que nos proches voisins. Pendant ce temps, les banques françaises disposent de dépôts de dizaines de milliards d'euros dans les paradis fiscaux. Et GDF, dont l'Etat est actionnaire à 30%, d'ouvrir une succursale au Luxembourg qui "répond à un schéma d'optimisation fiscale" (Voilà c'est dit!).
Ce flux d'argent caché, souvent sale de la spéculation, fabrique des profits insensés pour un petit nombre et impose l'austérité, la faim, la guerre et la mort au reste de la planète. Est-ce ainsi que les peuples doivent vivre?