Le 6 juin 1944 en Normandie et dans le Mantois
Le 6 juin 1944, au prix de très lourdes pertes, des soldats américains, britanniques, canadiens et une poignée de français débarquent sur les plages normandes, tandis que d'autres sont parachutés dans l'arrière-pays. Mais il faut attendre la percée d'Avranches du 25 juillet, pour avoir la partie gagnée. Rien qu'au soir du 6 juin, les Alliés perdent 10 300 hommes dont 30% sont tués. Lors de la percée d'Avranches, chaque mètre conquis coûte un soldat américain au 79e régiment d'infanterie.
Le 3 juin 1944, le Comité français de la libération nationale, présidé par le général de Gaulle, devient le Gouvernement provisoire de la République française (GPRF). Cette transformation n'est pas que de pure forme. Il s'agit d'un véritable défi aux Alliés anglo-saxons. Ceux-ci considèrent que le rétablissement de la loi et de l'ordre dans la France libérée doit se faire sous la supervision du général US Eisenhower, commandant en chef des forces alliées sur le front ouest. Avec la création du GPRF s'ouvre donc une période de fortes tensions entre les Français libres, les USA et la Grande-Bretagne. De ce fait, le GPRF est tenu à l'écart de la préparation du débarquement en Normandie.
Et c'est le 3 juin au soir, que le premier ministre britannique Churchill convoque le général de Gaulle. Le 4 juin, c'est le tour du général Eisenhower. Ces deux rencontres se passent très mal, de Gaulle refusant toute idée d'administration provisoire de la France par les Alliés. Son discours, prononcé aux petites heures du 6 juin, est le produit de rudes négociations. Dans les jours suivant, de Gaulle déjoue d'ultimes manoeuvres de Churchill pour parvenir à un bref aller-retour en Normandie, le 14 juin.
Le 6 juin 1944, par Radio-Londres, il annonce l'engagement de la "bataille suprême" sous l'impulsion des gouvernements et des forces alliées. Immédiatement après, le général de Gaulle appelle ses compatriotes à "combattre, par tous les moyens dont ils disposent" le gouvernement collaborationniste de Vichy et les Allemands. C'est aussi pour démontrer que la Résistance française, unifiée au sein du Conseil National de la Résistance, est une force militaire et politique d'importance que les USA et la Grande-Bretagne ne peuvent pas ignorer.
Dès lors, sont gênées les forces ennemies en sabotant les voies ferrées et de favoriser, par le renseignement et l'attaque, l'avance des Alliés. Dans le même temps, la Résistance prend contact avec les autorités militaires américaines afin de limiter les bombardements aériens à très haute altitude qui n'épargneraient pas les populations civiles. A-t-elle été entendue totalement?
Dans le Mantois, pas moins de 37 bombardements aériens se perpétuent entre avril et août 1944. En ligne de mire, les installations de la SNCF, les routes, les pont sur la Seine et les usines travaillant pour l'industrie de guerre allemande. Le bombardement aérien du 30 mai 1944, fort d'une centaine d'avions, fait 463 morts civils à Mantes, 35 à Mantes-la-Ville et 33 à Limay. Des quartiers entiers sont détruits.
Devant ces destructions, ces pertes civiles et ces nombreux blessés, la presse collaborationniste aux ordres de Pétain, Petit Mantais et Journal de Mantes, se fait encore plus les propagandistes de Vichy, tout en traitant de "terroristes" les résistants.
Cependant, pour le 14 juillet 1944, le comité militaire national des Francs Tireurs et Partisans Français appelle à faire de ce jour "anniversaire de la prise de la Bastille (...) un jour de combat, un pas en avant pour la libération du territoire".
Dans Mantes-la-Jolie occupée par les Allemands, Charles Callot, un cheminot, fleurit le Monument aux morts. A Bonnières/Seine, des jeunes filles parcourent les rues vêtues de bleu, blanc et rouge. A Vernouillet, où les cheminots de Mantes ont été regroupés après la destruction du dépôt, le drapeau tricolore est hissé sur les ateliers et la Marseillaise entonnée. Le 14 juillet 1944, c'est aussi l'exécution sous les balles nazies du FTPF mantais Fernand Bodet. Il transportait des armes, pour la protection des manifestations patriotiques devant avoir lieu dans plusieurs communes de l'Eure.
Début août 1944, le communiste Louis Racaud appelle la Résistance unie au sein des FFI du Mantois à:
1. réaliser, dès l'approche des troupes alliés, une coordination aussi étroite que possible entre les forces françaises de l'intérieur et l'armée Patton afin de mieux couvrir les axes de progression des blindés.
2. exercer une guérilla intensive pour démoraliser l'ennemi.
3. nettoyer les îlots de résistance, assurer la garde des prisonniers, les remettre à l'armée américaine, garder les armes ennemies et se mettre à la disposition des éléments réguliers pour toutes opérations de renseignements ou de patrouilles.
C'est dans un mission de renseignement au service des Américains, que le cheminot FTPF-FFI Henri Boucaut, garde-signal à Bonnières/Seine, est surpris par une patrouille allemande le 24 août 1944. Son corps n'a jamais été retrouvé.
Le 19 août, à 11h, Les soldats américains libèrent complètement Mantes-la-Jolie et vont marcher sur Vernon qui est libéré le 25 août 1944.
47 résistants du Mantois furent fusillés ou périrent en déportation.