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Publié par Le Mantois et Partout ailleurs

J+x confiné à Mantes-la-Jolie

Voila un pan de l'histoire d'un type bien ordinaire, la mienne.

Je me suis exilé en banlieue parisienne en 1972, pour y vivre en travaillant à la SNCF devant le chômage endémique qui sévissait dans le département de l'Aude et qui l'accable toujours. Les messieurs de la finance et leurs commis de tout horizon m'ont catalogué parmi les travailleurs privilégiés. Et certains, bouche bée, les croient.

Ma mère est veuve depuis ses 53 ans, mon père mort à 54 ans par son travail posté en 3x8. Ma mère ne touche que 937 euros de pension de retraite. 937 euros est la réversion de mon père ouvrier, plus du boulot saisonnier et précaire pour ma mère. Auparavant, tonnelier de métier dans un département à vignes, mon père connut le chômage, la précarité dans des emplois difficiles et le boulot dans une usine chimique. Ma mère, dite au au foyer avec deux enfants, a bossé au noir à faire de la couture ou du ménage pour la bourgeoisie qui ne la déclarait pas vu les charges qu'on lui imposait(sic). Et pour un foyer d'ouvrier, c'était ça ou rien pour arrondir les fins de mois.

Lorsqu'il fallut aider ma mère pour demeurer dans son domicile, le département de l'Aude ne lui alloua que 2 heures par semaine. Et il a fallu batailler ferme pour qu'elle accède au GIR3 et à 4 heures par semaine. Oui, toujours la lutte de classes! Dès le début de son grand âge, j'ai pris sur ma retraite de privilégié pour lui payer une aide-soignante libérale. Mais vaincue définitivement par la grande vieillesse, et parce que les gouvernements aux ordres du capital ne font rien, ma mère est entrée dans un service public de longue durée, à l'hôpital de Lézignan-Corbières au titre du GIR1, niveau le plus élevé en dépendance.

En France, 1 000 hôpitaux publics et 3 800 ehpad publics rattachés à un hôpital public. Ces services sont tous médicalisés pour le grand âge. Mais les places ne sont pas légions et le tarif mensuel moyen est de 1 801 euros. Calculez avec la pension indigne de ma mère, si mon frère et moi, lui s'était aussi exilé en région parisienne à la SNCF pour y être un privilégié, n'abondait pas.

En France, 7 500 ehpad sont confiés à des sociétés privées et donc à la financiarisation à outrance. Peu sont médicalisés pour le grand âge parce que non reliés à un établissement de santé. Manque de personnel plus criant encore que dans la santé publique. Les places sont libres et non faussées, comme le tarif d'ailleurs avec une moyenne de  2 620 euros. L'épouse de mon fils, fille d'un ouvrier, pour payer ses études supérieures, travaillait de nuit dans un ehpad à Bonnières-sur-Seine. Elle faisait fonction d'aide-soignante sans avoir le diplôme d'état et une seule infirmière pour tous les étages.  A qui profitait le crime?

Je n'ai pu rencontrer qu'une seule fois ma mère dans le service de longue durée de l'hôpital public de Lézignan-Corbières. Des opérations chirurgicales successives envers ma compagne et moi ont induit ce tragique gâchis et le tendre devoir d'un fils à l'égard de sa mère. Aujourd'hui, elle est confiné dans sa chambre avec une voisine et les visites sont interdites. Seul le téléphone me relie avec l'infirmière, moi confiné à Mantes-la-Jolie. Et si le covid-19 happe ma mère, avec le confinement dû à la politique criminelle du système capitaliste et notamment de la France?

On ose me bassiner qu'en ce mauvais temps, nulle place pour aucune polémique. Mais à qui profite le crime de se taire encore et toujours?

Et toujours de derrière les fagots:

Vigne de ma douleur

Quand tout commence ou tout s'achève

L'œil de la vie comme l'espoir

Une chanson en moi s'élève

Parfois à l'heure où point le soir.

 

Toujours je pleure de l'entendre

Encore et dépassant la nuit

Des fois qu'on veuille la pourfendre

Dans mon exil l'air est sans bruit.

 

Mais mes sanglots sont que peut-être

Je ne vois plus la vigne en fleurs

Et que derrière ma fenêtre

Je n'aperçois que ma douleur.

 

Et Claude Marti en occitan:

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