Les déportés du travail: ces oubliés de la journée nationale de la Déportation
Conformément à son ignoble idéologie raciale, l'Allemagne hitlérienne a déporté vers les camps d'extermination les Juifs et les Tsiganes de France. Elle a déporté également vers ces camps de la mort les opposants politiques au régime nazi dont les résistants communistes en grand nombre. Mais faut-il pour autant oublier les déportés du travail dont beaucoup périrent outre-Rhin?
Ils furent des exploités forcés dans l'économie de guerre allemande. Economie de guerre qui profita au capitalisme allemand allié jusqu'au bout avec le régime nazi et épargné par les tribunaux après le 8 mai 1945.
Aussitôt installé en France, l'occupant nazi fait travailler à son compte les entreprises françaises. Après avoir prélevé une part importante de la production industrielle et agricole, le Reich hitlérien exige le départ pour l'Allemagne des travailleurs français. Face à l'ampleur des pertes allemandes sur le front de l'est, la mobilisation de tous les hommes valides, les nécessités d'une guerre totale, les besoins de main d'oeuvre étrangère sont plus importants.
D'août 1940 à juin 1942, entre 60.000 et 150.000 volontaires partent en Allemagne. Leur nombre étant insuffisant, Laval instaure le 22 juin 1942 la Relève, dont le principe consiste à échanger un prisonnier de guerre contre trois ouvriers français qui partiraient en Allemagne. Cette initiative étant également un échec, le service du travail obligatoire, dit « STO », est instauré. Il prévoit la mobilisation de tous les gens nés entre 1920 et 1922. Entre 600.000 et 650.000 jeunes gens sont ainsi contraints à partir.
Parmi eux, Raoul Gouyen, ouvrier ajusteur au dépôt de Mantes-la-Jolie. Il est né le 8 janvier 1922 à Sainte-Gaburge dans le département de l'Orne. Son chef de dépôt n'oppose aucune difficulté pour qu'il parte en Allemagne le 5 janvier 1944, dans le cadre du travail obligatoire.
Raoul Gouyen va être travailleur forcé pour BW Nordhaussen. Le 5 août 1944, il est grièvement blessé dans un mitraillage de l'aviation alliée. Il décède le 12 août 1944. Sources: Archives Historiques de la SNCF au Mans : CXXV.3 118LM109/2, dossier n° 290 ; SGA-MdH : AC 21 P 28165.
Son nom est gravé sur la plaque commémorative du dépôt de Mantes-la-Jolie recensant les cheminots morts pour faits de guerre. Il figure également dans le marbre de la gare de Mantes-la-Jolie avec les cheminots du site ferroviaire fusillés ou morts en déportation.
Après une longue bataille parlementaire et judiciaire, les associations d'anciens "requis du travail obligatoire" obtiennent par décret du 16 octobre 2008 la dénomination officielle de "Victimes du travail forcé en Allemagne nazie". Mais celle de "Déportés du travail" est refusée le 28 mars 2011 par la Cour de Cassation.