La commémoration de la fin de la Première Guerre mondiale
Le cauchemar enduré par les soldats a marqué singulièrement leurs esprits. J'en veux pour preuve mon grand-père mobilisé en mai 1917 et qui survécut à cette boucherie mondiale.
Il ne tirera aucune gloire de ses nombreuses décorations (croix de guerre avec citation à l'ordre de l'Armée, médaille des blessés, médaille militaire et croix du combattant). Elles n'ont jamais pu estomper son obsession. Pour le peu qu'il en disait, jusqu'à son décès, il se tortura pourquoi lui survécut.
Mon grand-père ne participa à aucune commémoration officielle. Mais chaque 11 novembre, il était présent à l'écart, sur un bout de trottoir, sans décoration à sa boutonnière. Sur le Monuments aux morts de Port-La-Nouvelle étaient gravés pour l'éternité 52 noms et prénoms tués au combat, dont ses cousins ou ses copains d'école. Et dans les rues de ce petit village de l'Aude, il croisait des compagnons d'arme blessés à vie, des mutilés et des invalides. Et toutes les familles nouvelloises supportaient le deuil d'un ou de plusieurs êtres chers.
En février 2012, Nicolas Sarkozy a promulgué que le 11 novembre commémorerait l'ensemble des soldats morts au combat, de la Première Guerre mondiale jusqu'aux actuelles opérations militaires extérieures. La drauche au pouvoir n'a rien changé à la chose, trop contente de faire oublier que les socialistes dans l'été 1914 s'engageait dans l'Union sacrée au mépris de leur programme politique. Et l'ex-banquier d'affaires à l'Elysée ne changera pas plus la donne.
Le choix mémoriel de Nicolas Sarkozy est hautement discutable. Il cherche à faire oublier que le capitalisme poussait à la guerre lors de ce premier conflit mondial. Et nombre de soldats revinrent avec de la haine contre l'Armée qui leur avait fait endurer tant de misères et de sacrifices. On cherche également à gommer les ordres des états-majors français lançant leurs chairs à canon dans des offensives inutiles et combien meurtrières. Le choix mémoriel de Nicolas Sarkozy passe aussi à la trappe le partage colonial du monde qui va conduire à la Deuxième Guerre mondiale avec les conséquences subies encore aujourd'hui.
Car, comme l'écrivit Anatole France à propos de la Grande Guerre, dans l'Humanité du 18 juillet 1922: "on croit mourir pour la patrie on meurt pour des industriels."
Et les vers d'Aragon, mobilisé lors de la Première Guerre mondiale, résonne plus encore aujourd'hui: