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Publié par Le Mantois et Partout ailleurs

Le travail des femmes après la Première Guerre mondiale

     Lorsque le conflit débute à l’été 1914, les ouvrières sont 4 800 000 dans l’industrie, chiffre qui fléchit à moins de 4 400 000 en 1915. En cause, la fermeture d’usines causée par le départ des ouvriers à la guerre et le chômage dans d’autres tournants au ralenti. En 1916, le nombre de femmes au travail est près de 6 00 000, puis 6 200 000 en 1917, pour redescendre à moins de 6 00 000 en 1918, puis à moins de 5 00 000 au début de l’année suivante.

     La démobilisation des femmes dans les usines de guerre est brutale dès la fin des hostilités. Une circulaire ministérielle du 13 novembre 1918, deux jours après l’Armistice, informe qu’une prime, un mois de salaire, est offerte à toutes celles qui auront quitté leur emploi avant le 5 décembre 1918. Des entreprises privées suivent l’exemple de l’État. Catherine Olmès, dans Ouvrières parisiennes, marchés du travail et trajectoires professionnelles au 20e siècle, parle de débâcle rapide et massive pour l’emploi féminin. A titre d’exemple, elle cite les chiffres de l’Inspection du travail de Paris annonçant une chute de 56,8% et un taux de féminisation des effectifs industriels reculant de dix points depuis l’Armistice. Si, dans les services publics et administratifs, le nombre des femmes a doublé durant le conflit, dans les usines, il est revenu au niveau de 1906, les munitionnettes étant les plus touchées par le chômage.

     Après avoir encouragé le patriotisme des femmes pour combler la pénurie de main-d’œuvre masculine, elles sont renvoyées dans leur foyer pour repeupler la France ou reprendre leur rôle de ménagère auprès de leurs époux.

     Pour celles qui restent à travailler, les salaires, qui avaient connu une hausse, dégringolent. L’abattement pour les femmes en région parisienne est de 31% en 1921 ; il passe de 22 à 42% à Toulouse et de 16 à 37% au Havre. Et les employeurs ne peuvent que se féliciter de l’hostilité au travail féminin venue en grande part des syndicats et des ouvriers.

     Le Front populaire, par la signature des conventions collectives, corrige cet abattement. Or les rémunérations des femmes demeurent inférieures à celles des hommes jusqu’en 1946.

     Après la Première Guerre mondiale, l’un des membres masculins du Comité de travail féminin écrit sur les ouvrières : « Elles se distinguent par leur courage, leur habileté dans des travaux réclamant une grande sensibilité motrice, des mouvements rapides et précis. La femme est d’autre part économe, prévoyante par nature, et même âpre au gain ; un léger gain supplémentaire suffit parfois pour la faire travailler au-dessus de ses forces. » (L’individu dans l’organisation du travail. Jean-François Chanlat. Presses de l’université de Laval).

 

     Dès la fin de la Première Guerre mondiale, la politique populationniste et familiale bat son plein. La loi du 31 juillet 1920 réprime l’avortement et les pratiques contraceptives. Les mères de familles nombreuses -au moins 4 enfants- sont décorées (décret du 26 mai 1920) et la loi du 29 octobre 1921 octroie des avantages sociaux aux familles nombreuses.

     Dans l’entre-deux-guerres, le travail ménager est présenté comme un art ; le 1er salon des « arts ménagers » se tient à Paris en 1923. Mais la réalité est toute autre : logements exigus et insalubres, 1/3 des foyers sans électricité en 1938 et le salaire de l’homme, chef de famille, ne correspond pas à l’inflation.

    Certes, les lois du 5 et 30 avril 1930 promulguent une assurance maternité et celle du 11 mars 1932, les allocations familiales dans le commerce et l’industrie. Les institutrices et les « dames » de la Poste ont obtenu huit semaines de congés maternité en 1922.

     Or, bientôt, malgré le travail féminin vécu comme l’incapacité du mari à nourrir son foyer, devant la cherté de la vie, les femmes repartent travailler. De plus, les morts et les mutilés de guerre ont fait chuter la population masculine ; d’autre part, le Nord et l’Est du pays dévastés par la guerre, sont à reconstruire. Face à une pénurie de main-d’œuvre, le taux d’activité féminin dépasse les 36% en 1926.

 

   Catherine Olmès, dans Ouvrières parisiennes, souligne que dans le département de la Seine, le nombre d’ouvrières métallurgistes sextuple de 1906 à 1931. En région parisienne, dans la chimie, les effectifs féminins quadruplent, ils doublent dans l’alimentation. Le secteur des liqueurs et des spiritueux atteint 29,5% de femmes salariées en 1931, contre 4,9% en 1906 ; dans cette industrie, les ouvrières représentent 57% en 1931.

     Mais cet essor ne modifie pas les clivages dans le travail entre les deux sexes. Rares sont les femmes qui accèdent à des postes qualifiées ou d’encadrement. De même, les salaires des femmes sont inférieurs à ceux des hommes, quand les premières ne retrouvent pas leurs gains en matière de rémunérations acquis durant la guerre 1914-1918.

 

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