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Publié par Le Mantois et Partout ailleurs

Une rencontre et l'histoire racontée par José Fort

Hommage au Che: samedi 21 octobre 2017 à Villeneuve d'ASq (59). Salle Desquenes Place Descat. de 13h à 1 h du matin.

Le programme en lien sur Commun commune:

Et l'histoire racontée par José Fort sur son blog:

Le 9 octobre 1967, Ernesto Rafael Guevara de la Serna était abattu en Bolivie sur ordre de la CIA et de la dictature en place à La Paz. Il y a tout juste 50 ans disparaissait le « Che ». J’entends et je lis en ce moment tant d’âneries et de mensonges sur cette figure révolutionnaire que je voudrais lui consacrer ma chronique ce soir. Avant tout, je veux vous conseiller une lecture : si vous voulez en connaître un peu plus sur Guevara, lisez «  Vive le Che » de mon ami Jean Ortiz édité il y a peu aux éditions Arcane 17. Il s’agit d’un livre référence réalisé par un journaliste-historien-universitaire spécialiste de l’Amérique latine. Il connaît parfaitement son sujet. Plongez vous dans cet ouvrage. Vous en sortirez vacciné des imbécilités qui traînent ici et là.

Pourquoi Guevara est-il porté au panthéon des mythes de notre temps ? Pourquoi les nouvelles générations choisissent-elles de porter  des tee-shirts à son effigie ? Pourquoi le Che apparaît-il si moderne et provoque-t-il tant d’admiration ? A chacun son Che.  Pour moi, ce sont les qualités de rebelle, de courage, de droiture, d’éthique qui emportent l’adhésion des jeunes du monde entier à ce personnage. Il a préféré aux honneurs  la lutte anti-impérialiste, au socialisme sclérosé, l’action internationaliste, aux sirènes des apparats et des passe-droits, la simplicité et l’engagement révolutionnaire.

Ernesto Rafael Guevara de La Serna est né le jeudi 14 juin 1928 à Rosario en Argentine. Il aurait pu vivre bourgeoisement car il était fils de famille, comme on dit, «  à l’aise », certainement un peu plus. Il étudie médecine, montre peu d’intérêt pour la politique, alors que ses parents affichent leur hostilité au régime péroniste.

Premier voyage au Chili, au Pérou, en Colombie en octobre 1950. A 23 ans, Il repart à la fin 1951 sillonner l’Amérique latine.

Plus tard au Mexique, il rencontre Fidel Castro et décide de s’engager dans le mouvement révolutionnaire aux côtés des rebelles cubains, qui lui donnent le surnom « El Che », che étant une interjection  dans le langage parlé argentin (comme hé) dont Guevara usait souvent. « Je passais toute la nuit à parler avec Fidel », écrira Che, poursuivant : « A l’aube, j’étais le médecin de sa future expédition. Il est vrai que, depuis la dernière expérience vécue au cours de mes voyages à travers l’Amérique latine, et finalement au Guatemala, il ne fallait pas beaucoup pour m’inciter à entrer dans n’importe quelle révolution contre un tyran. Fidel m’a impressionné. Je fus gagné par son optimisme. Il fallait passer à l’action, combattre et concrétiser. »

Che sera de tous les coups : le débarquement à Cuba du « Granma » en 1956, la guérilla dans la Sierra Maestra, la bataille de Santa Clara, la victoire de la révolution cubaine, l’entrée dans La Havane en janvier 1959. Un mois plus tard, pour service rendu à la patrie, Ernesto Guevara est déclaré citoyen cubain. Alors commence le deuxième chapitre de l’histoire.

Guevara n’était pas un spécialiste de l’économie. Il effectue pourtant ses premiers déplacements à l’étranger pour traiter de ces questions puis occupe successivement les postes de président de la Banque nationale de Cuba et de ministre de l’Industrie. Etait-il le mieux placé pour occuper de telles fonctions ? Je ne le crois pas mais à l’époque les candidats ne se pressaient pas au portillon.

L’attitude des gouvernants étatsuniens allait radicaliser la révolution. C’est ainsi que le Che notait qu’à « chaque coup de l’impérialisme US nous devions riposter. » La construction du socialisme «  ce drame étrange et passionnant », selon le Che, était à l’ordre du jour pour la première fois en Amérique latine. Entre 1963 et 1965, Guevara effectue de nombreux voyages dans le tiers-monde, en Chine et en URSS. Il critique « la bureaucratie du socialisme réel », affirmant que «la recherche marxiste avance sur une route dangereuse. Au dogmatisme intransigeant de l’époque de Staline a succédé un  pragmatisme inconsistant ».

En février 1965, lors d’un discours prononcé à Alger, il critique les pays dits socialistes « complices dans une certaine mesure de l’exploitation impérialiste. » La goutte qui fait déborder le vase de la colère des dirigeants soviétiques contre celui qui déclare : «  Il faut fuir comme la peste la pensée mécanique. Le marxisme est un processus d’évolution. Le sectarisme à l’intérieur du marxisme crée un malaise, un refus de l’expérience. » Le Che accepte aussi de reconnaître ses propres erreurs : l’excès de volontarisme, une politique souvent désastreuse en matière agricole, l’industrialisation à marche forcée ne prenant pas en compte les contraintes nationales et internationales fournissant une production de médiocre qualité à un prix élevé. Ernesto Guevara était médecin et révolutionnaire, pas économiste.

Le Che quitte les allées du pouvoir et Cuba en 1965. Le monde s’interroge : où est passé Guevara ? L’ancien ministre a repris son treillis vert olive avec pour objectif l’élargissement du front anti-impérialiste, avec le total accord et soutien de Fidel Castro. Entre ces deux hommes aux qualités complémentaires, contrairement à une légende, l’entente était totale. Ils se partageaient les taches.

Ernesto Guevara part pour le Congo   « venger » Patrice Lumumba assassiné et soutenir le mouvement révolutionnaire dans sa lutte contre Moïse Tschombé. La guérilla composée de Cubains et de Congolais s’enlise au fil des mois. Au manque de moyens et des dissensions entre les différents groupes rebelles congolais s’ajoutent les pressions venues de Moscou et de Pékin. Le Che devra constater que « nous ne pouvons pas libérer tout seul un pays qui ne veut pas se battre » et quittera l’Afrique, voyagera clandestinement, avant de lancer une guérilla en Bolivie. Son dernier combat à forte valeur symbolique et stratégique.

Symbolique ? La Bolivie, dirigée à l’époque par le dictateur Barrientos, porte le nom de Simon Bolivar, leader des guerres d’indépendance contre la domination espagnole.

Stratégique ? La Bolivie se trouve au cœur du continent et dispose de frontières avec le Brésil, l’Argentine, le Paraguay, le Chili et le Pérou.

Après plusieurs mois, la guérilla s’enfonce dans l’échec. Pour plusieurs raisons : le manque d’un soutien populaire, une armée bolivienne bénéficiant d’une aide massive des Etats-Unis, la mobilisation de la CIA sur le terrain, le mauvais choix du lieu d’installation de la guérilla, l’absence de relais avec les villes, le rejet par les organisations syndicales et progressistes et l’hostilité des communistes boliviens inspirés par Moscou.

En ce début du mois d’octobre 1967, la plupart des compagnons du Che sont morts ou en fuite. Guevara tente d’échapper à la traque. En vain. Cerné, il est fait prisonnier au matin du 8 octobre à quelques kilomètres de La Higuera, une bourgade située dans la précordillère andine. Blessé, il est installé sous bonne garde dans une classe d’une petite école. Les responsables de la CIA et les hommes du dictateur Barrientos consultent  La Paz et Washington. Et c’est le colonel Zentana qui donna l’ordre au sergent Mario Turan de tuer Guevara. Neuf ans plus tard, le colonel Zentana devenu diplomate en France fut abattu dans une rue de Paris. Nous ne le regrettons pas.

José Fort

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