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Publié par Le Mantois et Partout ailleurs

Ou faire tout, pour chasser le mauvais monde, en menant la lutte des classes sur tous les fronts, avec radicalité, sans baisser le niveau de la riposte, tel est le message de Jean Ortiz auquel j'adhère.

"Pour beaucoup de ces jeunes qui s’investissent dans la « Nuit debout » à Pau, la réalité, la représentation du monde, c’est la situation économique, politique, sociale, affective, qu’ils malvivent concrètement, et non ce qu’elle pourrait être. 

Comment avoir à la fois une image négative du capitalisme, et être, insistons encore : à la fois, contre lui et pour la « libre entreprise », à la fois contre « l’argent roi » et pour « que les privilégiés que nous sommes tous fassent des sacrifices », à la fois contre « les patrons » et pour la culpabilisation des gagne-petit... « qui se plaignent alors qu’en Afrique on crève de faim... ». « A la fois », à la fois, jusqu’à l’overdose hépatique... « Moi je vis... -qui- avec un demi-Smic, -qui- avec des petits boulots, -qui- avec mon jardin, et j’en ai assez ».
Ils sont forts les néolibéraux pour retourner les omelettes ! Il est fort le capitalisme pour façonner, manipuler les esprits, pour rendre ses victimes responsables de leur précarité, de leur exploitation, et les pousser à se «contenter de peu », au nom de « la misère du monde », qu’il a créée, un monde où 1% de nantis possède plus que les 99% restants de la population.
Pour beaucoup de ces jeunes qui s’investissent dans la « Nuit debout » à Pau, la réalité, la représentation du monde, c’est la situation économique, politique, sociale, affective, qu’ils malvivent concrètement (même si la plupart ne l’analysent pas en lien avec la lutte des classes), et non ce qu’elle pourrait être. D’autant plus que la panne d’alternative (de rupture) plonge dans une obscurité peu propice à la réflexion. S’en tenir au : « les idées dominantes sont celles des classes dominantes » est absolument nécessaire mais ne suffit pas. Chaque prise de parole est bourrée de contradictions... Comment pourrait-il en être autrement ?
L’offensive du capitalisme « mondialisé », l’effondrement du bloc « socialiste », devenu un repoussoir aux yeux de la majorité, le renoncement, pendant une trop longue période, à des approches « révolutionnaires », ont entrainé une vertigineuse crise des valeurs, un brouillage des repères, des clivages, une banalisation des discours racistes, sécuritaires..., une stigmatisation du socialisme, de la révolution... Et au même moment, ils sont là, sur cette place Clémenceau, des dizaines de jeunes insatisfaits, en colère (souvent non conceptualisée), en souffrance, en recherche... Et ils contribuent à leur manière à la réactivation des luttes sociales, idéologiques... même si peu analysent « en termes d’émancipation », «  de classe », de « rapports sociaux »... La bourgeoisie, peu en parlent... Elle joue sur la peur, la dépolitisation, la division, monopolise l’Etat, les institutions, les médias ; elle a gagné, momentanément, la bataille des idées, « l’hégémonie idéologique et culturelle », ce qui ne saurait constituer un prétexte pour rentrer définitivement dans le rang, se résigner, considérer tout combat comme vain, décréter le capitalisme horizon indépassable de l’humanité et s’y rallier à la Macron, à la Valls, à la Hollande, à la Cambadélis, à la manière des ex-« partis socialistes » ou « sociaux-démocrates », en Europe et, pour ce que je connais assez, en Amérique latine aussi.
Comment contester et finir par reconquérir « l’hégémonie » contre le système capitaliste ? Cela passe par le débat vrai, sur le fond, à contre-courant s’il le faut, à des millions de voix, afin de contribuer à propager une culture politique alternative, à faire reculer l’emprise du discours dominant, en menant la lutte des classes sur tous les fronts, avec radicalité, sans baisser le niveau de la riposte."
Les nuits à fleur de Pau par Jean Ortiz

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