Pourqoui le gouvernement Bayrou veut taxer les mutuelles
Dans sa chronique santé de tous les mardis dans l'Humanité, Christophe Prudhomme, médecin urgentiste et syndiqué CGT, répond:
Alors que le gouvernement explique qu’il ne souhaite pas de hausse d’impôts généralisée, le premier ministre a annoncé qu’il allait augmenter la taxe sur les assurances-maladie complémentaires. L’explication avancée est qu’elles auraient trop augmenté les cotisations, anticipant les baisses de remboursement annoncées par feu le gouvernement Barnier, et qui ont été finalement abandonnées.
Mais quel mensonge ! L’augmentation de ces dernières années est largement liée au déremboursement régulier d’un certain nombre de prestations, dont les plus récentes sont la hausse du ticket modérateur sur les frais dentaires, les transports sanitaires ou encore certains médicaments. Ainsi l’augmentation moyenne des tarifs des mutuelles depuis 2020 est d’environ 30 %.
Le scandale, c’est que l’État prélève déjà un impôt sur les complémentaires de près de 14 %, qui sert à financer la protection universelle maladie (ancienne CMU) et la complémentaire santé solidaire. Cet impôt est particulièrement injuste, car le tarif des complémentaires est uniforme, ce qui fait que les plus pauvres paient proportionnellement plus que les plus riches et assurent l’essentiel de la solidarité avec les plus pauvres qu’eux !
« Aujourd’hui, ce sont les pauvres qui payent et les riches qui se gavent. »
Augmenter encore cette taxe empêchera les mutuelles de pouvoir diminuer l’an prochain le niveau de leurs contrats. Ce devrait être la règle pour le financement de notre système de santé : si une année les dépenses sont supérieures aux prévisions, les cotisations augmentent l’année suivante, mais diminuent si c’est l’inverse. Cela existe en France avec le régime particulier d’Alsace-Moselle, qui a fait passer récemment son taux de cotisation de 1,5 % à 1,4 % du salaire.
L’impôt mérite une autre approche pour être accepté par les citoyens. Il doit être proportionnel aux revenus. Or, aujourd’hui, ce sont les pauvres qui payent et les riches qui se gavent. En témoigne l’explosion des dividendes des entreprises du CAC 40, qui ont atteint 100 milliards d’euros. Entreprises qui par ailleurs contournent honteusement le paiement de l’impôt en France, ce qui fait que leur taux de prélèvement est de moins de 5 % alors que celui des PME atteint 25 %.
Alors messieurs Macron, Bayrou et consorts, cessez de mentir aux Français. Il est possible d’équilibrer les comptes de la Sécu, y compris de la branche retraite, en taxant ces dividendes à hauteur de 25 %. Cela dégagerait 25 milliards d’euros pour que la Sécu ne soit plus en « déficit » et que nous puissions abroger la réforme des retraites. La conclusion, c’est qu’il faut supprimer les impôts injustes et taxer ceux qui accumulent des richesses qui nous manquent pour assurer le financement de notre système de santé et de nos services publics.