Chemin de faire, ensemble, peut-être
Je profite d'un voyage dans mon Languedoc natal pour ressortir, dans mon blog inoccupé quelques temps, une poignée de mes poèmes. Sans prétention aucune. Simplement pour peut-être activer le changement de ce vieux monde dur et gris. Tous ensemble.
Révolutionnaire
Le vieux vigneron
Assis
Sa couronne blanchie
Regarde la feuillée
S'éfaufiler au vent mauvais.
Demain
Sa montre
Ne marquera pas l’heure nouvelle.
Mais avant de s’endormir
Ses mains anciennes
S’enrouleront à sa canne
Et de la terre vers son cœur
Accourront
Tous les échos des siècle
Et cette sève qui fait grandir
Bien plus haut que les étoiles
Le Paris-Rouen
Sur un chantier des ombres se faufilent
Avant qu'un train ne les lèche et défile.
Mais qui prête attention à leurs visages
Bleuis de peine, mal-aimés, sans âge?
Au passage du monstre qui déboule,
Ils ont tangué comme pris par la houle.
Pourtant, dans leur vertige, naît un sourire,
Une belle idée qui semble tout dire.
Voyagez banquiers, bourgeois et tribuns,
Sans un regard sur nous, gens du commun!
Mais il n'empêche et voici notre foi:
Un jour sera, nous serons maîtres de la voie.
Crève- cœur
La dernière lueur soufflée
Un cœur s'est affaissé
Sur son chemin sans réponse.
Et sous la voûte aux étoiles arrachées
La lame du coutelas
De son pas tranquille
A tranché un ultime frisson de vie
L'espoir oublié.
Quand
Sur l'enclume de l'horizon
De notre marteau puissant
Ferons-nous jaillir
la volonté d'une autre histoire?
Oui
Une nouvelle histoire.
Les vaincus
En ces temps de mensonges
Et de trahisons,
Le grand cirque des brutes
A monté son chapiteau
Au milieu de votre cœur.
Derrière les barreaux,
Une multitude,
Avec le silence des lâches,
Comme le seront vos enfants.
Les mots vides et la faiblesse
Font toujours les défaites
A travers les siècles.
Plus fort chaque jour,
De votre labeur,
De vos plaies,
De votre misère,
Et de vos morts,
Vos dompteurs
Gouvernent même la moindre de vos plaintes.
Vous n'auriez qu'un rêve,
Il serait pareillement opprimé
Tant vous vous fiez
Aux restes qu'on vous jette
Après vous avoir fouettés.
Nous rencontrerons-nous un jour?
Mon rêve reste grand ouvert
Aux hommes libres.
Mais vous persévérez à tourner en rond
Dans la cage des pas perdus,
Vaincus,
Dans votre gueule,
Un bout de charogne
Lâché par vos maîtres.
Je ne vous aime pas.
La nuit se dévêt de ses ultimes étoiles,
Sur l'horizon s'enflamme la pointe du jour,
S'emperle de rosée chaque fil de la toile,
La source récite son chant clair sans détour.
Le printemps sonne dans les sarments de la vigne,
Promesses vives d'une odeur d'ambre et de vin,
Lorsque le raisin sera infini et digne
Des abeilles ou du papillon grenadin.
A cet instant précieux, quand débute l'enfance
De toutes ces fleurs que connurent ses aïeux,
Le vigneron retrouve son pas et s'avance,
Tranquille, maître de cette terre et des cieux.
L’espace
Sans trace,
La peur.
Renaître,
Peut-être,
Ailleurs.
Une flamme
Comme une âme,
Un grelot.
Sur la grève,
Pour le rêve,
D’autres flots.
Encore un geste,
Un peu qui reste,
Un fil d’argent,
Contre les ombres
De ces décombres
Intransigeants.
Une heure nouvelle
De plus en plus belle,
Fière et résolue,
A l’audace grande
Pour céder l’offrande
Et le vrai salut.
C’est l’essaim qui tourbillonne,
Palpite et puis aiguillonne
Les semailles de demain
Et l’existence prochaine
Plus forte que les grands chênes.
Amis, donnons-nous la main !
Quand l’homme dépasse son rêve
Et que d’autres tiennent le glaive
Pour crever l’éternel sommeil,
Dans les regards, tout ce que j’aime,
L’emportement et le blasphème
Pour ravir aux dieux leur soleil.
Un drapeau pour seule espérance,
Sortir l’humanité de son absence
Et verser à longs flots que du bonheur.
Mais se sont élargis des précipices
Qui mettent fin à tous les jours propices :
Les bourreaux sont d’ici et pas d’ailleurs.
Des fossoyeurs en quelque sorte,
Que les ténèbres les emportent,
Vampires et dragons à la fois.
Ce songe éclatant pour la terre
Ne connut pas la primevère
Et revint la mauvaise loi.
Étions-nous de faux complices
Du crime et des injustices
Où leurs bras se sont baignés ?
Pour avoir tu un carnage
Et idolâtré l’image,
Rien ne nous est épargné.
Un cœur cessa de battre,
De mille ils furent quatre,
Tout perdre ou bien mourir.
Voilà le prix funeste
Pour le peu qu’il en reste
Dont on ne sait guérir.
Espérance morte
Que le vent emporte
De ses mains crochues.
Que le ciel en tremble,
Mais que vous en semble
De ce temps perdu ?
Va descendre
De la cendre
Parmi nous,
Quelques braises
Qui s’apaisent
Et c’est tout.
Jeunesse,
Promesse,
enfuies.
Vieillesse
Maîtresse :
la nuit.
Sans bruit.
Pourtant…