Aéroport Nd-des-Landes: le gouvernement cache des infos défavorables au projet
Rédigée le 9 septembre 2014 par le chef du service « ressources naturelles et paysages » de la direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (Dreal), cette note précise que « l’allongement de la piste de l’aéroport de Nantes Atlantique ne présente pas de risque pour la faune de la réserve naturelle et n’augmente pas le péril aviaire ». « Sur le plan du dérangement des oiseaux, le trafic aérien actuel n’a pas d’impact négatif », écrit Xavier Hindermeyer, affirmant que « la variation de cette activité » ne générerait pas de stress supplémentaire. « En effet, les contraintes d’urbanisme autour de l’aéroport entretiennent une ceinture verte constituée d’un bocage ancien et de nombreuses prairies humides entre l’agglomération nantaise et la réserve, qui fait office de zone tampon », précise-t-il.
Ce document entache encore un peu plus la gestion du dossier. D’abord parce que sa dissimulation montre que le débat, sensible, autour de la construction de l’aéroport à Notre-Dame-des-Landes est entaché de dissimulations. Ensuite, parce que l’un des arguments pour légitimer le transfert, écologique de surcroît, n’a pas lieu d’être.
Faux argument écologique
« Contrairement à ce qu’on peut entendre dire ici ou là, il [le projet de transfert] est également bon pour l’environnement, car l’actuel aéroport de Nantes est au contact de trois zones Natura 2000, dont le réservoir à oiseaux du lac de Grand-Lieu », affirmait le premier ministre, Manuel Valls, au Sénat le 16 octobre 2015. Et l’association Des ailes pour l’Ouest, qui milite pour le transfert de Nantes Atlantique vers Notre-Dame-des-Landes, ne cesse de répéter que l’extension de l’actuel aéroport est « inacceptable pour les (vrais) défenseurs de l’environnement qui ont à cœur de préserver le lac de Grand-Lieu. »
Certes, ce lac, situé à une quinzaine de kilomètres au sud de Nantes, qui s’étend sur une surface de plus de 6 000 hectares en hiver, héberge des spatules blanches, des hérons, cendré, pourpré…, soit 270 espèces d’oiseaux, 50 espèces de mammifères dont la loutre, et plus de 550 espèces de végétaux. Mais cette richesse de la biodiversité ne serait pas menacée par l’extension de la piste, un élément essentiel du projet d’optimisation de l’actuel aéroport, défendu par les opposants au transfert.
Irrité par l’utilisation de cet argument « écologique », le directeur de la Réserve naturelle du lac de Grand-Lieu, « pendant vingt-trois ans depuis sa création », Loïc Marion, a même écrit au premier ministre le 28 octobre 2015. Sa lettre, que Le Monde s’est procurée, va dans le même sens que la Dreal. « Je n’ai jamais constaté la moindre gêne des oiseaux de ce lac due aux avions utilisant l’aéroport actuel de Nantes Atlantique (…). Tout au contraire, l’abandon de Nantes Atlantique constitue une menace bien réelle pour le lac de Grand-Lieu, dans la mesure où ses périmètres de protection (réserve naturelle, site classé Natura 2000) ont été définis au plus juste près du lac, en tenant compte de la protection de fait assurée par le périmètre de protection antibruit de l’aéroport. (…) Le déplacement de l’aéroport mettrait fin à cette protection, et des élus locaux n’attendent d’ailleurs que cette issue pour pouvoir urbaniser tout ou partie de ce corridor », écrit Loïc Marion.
La possible récupération d’une partie de l’emprise territoriale de Nantes Atlantique pour étendre l’agglomération nantaise est en effet un enjeu du dossier.
« Dissimulations inacceptables »
La publication de cette note relance le débat autour des alternatives possibles au transfert. Les écologistes et les organisations de défense de l’environnement dénoncent « les dissimulations inacceptables de l’Etat », selon les mots de France Nature Environnement. Jusqu’au Front national, hostile au transfert d’aéroport, qui réclame la publication immédiate de la note « pour que toute la lumière soit faite sur l’ensemble des études prospectives relatives au projet d’aéroport, qu’elles soient favorables ou non. »
C’est justement la tâche confiée par la ministre de l’environnement, Ségolène Royal, à une mission dont le rapport est attendu pour la fin mars : tout mettre à plat. En attendant, le premier ministre accélère la mise en œuvre du référendum local annoncé par François Hollande, le 11 février. Dans une interview à Ouest-France, le 17 février, Manuel Valls réaffirme que le chantier doit débuter, malgré l’occupation de la zone par les opposants. « Parce qu’il faudra assumer cette expulsion au mois d’octobre, pour que les travaux puissent commencer, cette consultation locale est nécessaire », réaffirme-t-il. M. Valls, malgré le flou sur la légalité de cette consultation locale sur un projet d’intérêt national, a précisé que le périmètre électoral serait le département de la Loire-Atlantique, alors que de nombreuses voix demandent une base plus large.
« Moi je suis de Vendée, je ne pourrai pas voter. Alors que c’est un projet qui concerne la Bretagne et les Pays de la Loire », a ainsi expliqué Bruno Retailleau, le président (Les Républicains) de la région Pays de la Loire, fervent défenseur du projet, sur France Inter le 16 février. « Tous ceux qui utilisent ces arguments, au fond, ne veulent pas de la consultation. Mais je le dis clairement, si on empêche la consultation, il n’y aura pas d’alternative et les travaux démarreront de toute façon à l’automne », insiste pour sa part le chef du gouvernement.
Source: Le Monde 19-02-2016
D'où la manif du 27 février 2016 et les absents auront toujours tort!