Et si nous nous obligions à regarder notre société en face?
Vraiment, car un jeune chauffeur de bus à la Ratp est-il devenu fou pour devenir islamo-fasciste et assassiner, sans état d'âme, d'autres jeunes au Bataclan? Quelque chose a raté et la seule réponse sécuritaire, comme la chaude compassion envers les victimes, ne suffira pas à faire oublier que l'ex-patrie des droits de l'Homme recense des barbares fanatisés sur son sol.
Oui, quelque chose a raté et nous n'en discutons pas en laissant le beau rôle au clos politicien de la pensée unique.
Nous ne discutons pas de l'impasse dans lequel ont été enferrés des hommes et des femmes, venus de nos anciennes colonies pour vendre leur force de travail au capitalisme français. Lequel les a jetés ensuite dans le tréfonds des cités pour les oublier.
Nous ne discutons pas de leurs enfants et leurs petits-enfants nés en France dans ces ghettos, avec pour seule perspective le chômage et la précarité ou la délinquance, tout en rejetant la religion calme de leurs aînés. Et de peur de stimagtiser la confession musulmane, nous ne discutons pas de l'islam d'extrême droite et de son financement, alors que cette bête immonde englue dans ses rêts trop de jeunes. La défense de la laïcité n'est pas le silence obtus. Encore que, loin de stigmatiser l'islam de France, selon les sociologues plus de 20% de dijhadistes sont des convertis, élevés eux dans la soi-disant laïcité de la République française. Là aussi, quelque chose a raté.
Alors, instaurer l'état d'urgence changera-t-il la situation?
Non, l'état d'urgence, approuvé par toutes les formations politiques présentes au Parlement, de l'extrême droite au Fg, repousse toujours plus l'urgence absolue en matière de libertés, d'égalité et de fraternité. Sous l'état d'urgence, un préfet peut, à sa guise, fermer une salle de spectacle, un lieu de réunion ou interdire une manifestation. Sans contrôle judiciaire ni de compte à rendre au Parlement. Et pendant que nous finançons l'état d'urgence, se réduisent plus encore les budgets accordés au social, à la santé, aux services publics ou à l'éducation: l'austérité est toujours à l'ordre du jour dans l'UE capitaliste.
Et cette riposte populaire à la barbarie islamo-fasciste ne doit-elle se cantonner qu'à allumer une bougie éphémère sur les lieux du crime et puis s'en retourner chez soi en pleurant à chaudes larmes et souhaiter que demain aille mieux, comme ça, d'un coup de baguette magique ? Sans jamais regarder les causes de cette abomination, ni les enjeux géopolitiques du capitalisme dans le monde ni la nature de notre société.
De la même façon, dans la préparation du congrès confédéral de la CGT, quelles couleurs de l'arc-en-ciel sont sur le nombre de nos syndiqués?
Vaste perspective en débat et qui suis-je, moi, cet infime confetti, retraité de surcroît?
Pour autant, comme l'a écrit très justement Albert Camus: "Ne pas nommer les choses, c'est ajouter du malheur au monde".
Et pour ma part, je crois au verbe conjugué à l'action.