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Publié par Le Mantois et Partout ailleurs

Les revoilà, appelant à manifester pas pour une meilleure vie sur terre, mais contre le mariage civil pour tous: la droite, l'extrême-droite et l'église de France. C'est André Vingt-Trois, cardinal de Paris et chef des évêques français qui a sonné la charge. Et l'UMP s'est engouffrée derrière les soutanes, suivie à la culotte par le consortium de la famille Le Pen.

Que voulez-vous, l'histoire sociale est peuplée de cette alliance contre tous les progrès sociétaux.


Aujourd'hui, c'est pour eux le droit des enfants à se construire en référence à un père et une mère. A oublier la Sainte famille dont ils se réclament. En effet, Jésus, le fils des entrailles de Marie, n'a pas été élevé par son vrai père, si j'en crois l'histoire. Et Joseph, au demeurant un bien brave homme, n'a rien dit que son épouse ne soit pas enceinte de ses oeuvres.

Mais je m'égare, je ne suis qu'un mécréant qui ne comprend rien à la vie de chaque jour, aux enfants brutalisés, sinon plus, par leurs propres parents, à l'existence malheureuse des orphelins dont les géniteurs ont été exterminés par la guerre au nom de la religion ou du fric, souvent les deux à la fois, à cette croix qui a soutenu Hitler, Franco ou Pinochet et bien d'autres encore...

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Allez, la parole de Jean-Marie Bonnemayre, président du Conseil national des associations familiales laïques qui défendent le mariage pour tous, parue dans l'Humanité et que les médias du sabre et du goupillon ont tue:

 

Vous êtes la seule association familiale membre de l’Union nationale des associations familiales (Unaf) à être favorable au projet de loi de mariage pour tous et au droit à l’adoption 
pour les couples homosexuels. Détaillez-nous votre position ?

Jean-Marie Bonnemayre. Dès la création du Cnafal, en 1967, on a pris le contre-pied de l’Union des associations familiales. Cette dernière considère que la famille est la cellule de base de la société. Nous, nous faisons référence à la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 : c’est la personne qui est au centre, et ensuite, les couples s’assemblent et se désunissent comme ils l’entendent, font des enfants ou n’en font pas. L’Unaf revendique une idéologie nataliste. Le 23 juin dernier, la ministre de la Famille, Dominique Bertinotti, a été copieusement sifflée lors de l’assemblée générale de l’Unaf à Toulon. C’est la première fois qu’une ministre de la République se faisait ainsi siffler à une assemblée de l’Unaf. Ce n’était arrivé ni à Roselyne Bachelot ni à Nadine Morano, qui s’étaient pourtant prononcées toutes les deux en faveur du mariage homosexuel, avant de changer d’avis. Le comportement à l’Unaf est différent en fonction de la couleur politique du ministre. Nous sommes la seule association familiale nationale à être quasiment depuis vingt ans en faveur du mariage pour tous. Il était important de montrer qu’à l’intérieur de l’Unaf, il y avait d’autres conceptions de la famille.

 

Que répondez-vous à ceux 
qui affirment, même à gauche, 
que cette loi n’est pas une priorité 
en ces temps de crise ?

Jean-Marie Bonnemayre. La gauche a toujours été à la pointe du progrès en ce qui concerne la famille. Elle a toujours œuvré depuis 1792 pour l’égalité au sein de la famille. Il faut se souvenir que, le 4 août 1982, c’est le premier gouvernement socialiste de Pierre Mauroy qui a dépénalisé l’homosexualité  (après avoir amnistié le « délit » d’homosexualité le 4 août 1981– NDLR) ! Pour le progrès et en faveur de l’émancipation humaine, aucun combat n’est négligeable. Les vieux républicains laïques et radicaux-socialistes de la IIIe République ont mené tous les combats de front. Pour eux, tout était lié. Plus les individus sont émancipés et égaux, plus ils ont la capacité de développer des luttes dans le champ social. C’est un seul et même combat, celui de l’égalité. Le mariage pour tous s’inscrit dans les combats pour l’école laïque et obligatoire, pour les droits du travail, pour l’ouverture des écoles aux jeunes filles, pour la séparation de l’Église et de l’État, pour l’égalité entre hommes et femmes. Sur ce dernier point, les républicains n’y sont pas tout à fait parvenus, le poids de l’Église était tellement fort. Il fallait arracher les familles à l’emprise de l’Église catholique. Au passage, je relève que les protestants n’avaient pas du tout la même conception du mariage que les catholiques. Ils ne considéraient pas ce sacrement comme indissoluble et ils admettaient parfaitement le ­divorce. Je dis cela car la plupart des républicains laïques de la IIIe République étaient également protestants.

 

On voit bien que l’accès au mariage pour tous et, plus encore, la question de l’adoption bousculent la famille traditionnelle, normée, nucléaire, basée sur les liens biologiques…

Jean-Marie Bonnemayre. La famille n’est pas quelque chose de naturel, c’est quelque chose de construit. Nous sommes dans le champ de la culture et de l’acquis. Les anthropologues l’affirment, il y a eu des milliers d’organisations de familles depuis que l’homme s’est regroupé en société. Nous sommes dans une phase où nous pouvons séparer la sexualité de la procréation. Les femmes ont conquis la liberté de faire ou non des enfants, elles ne sont plus attachées à un homme et dans l’obligation de faire des enfants sans qu’on leur demande leur avis. Notre société permet une plus grande autonomie aux individus. On a désormais le choix de ses affinités. Cela ouvre le champ des possibles.

 

Pourquoi le législateur a-t-il autant de mal à suivre ces évolutions ?

Jean-Marie Bonnemayre. L’expérience montre, depuis la Révolution française, que le droit a toujours du retard par rapport à l’évolution des mentalités. On peut considérer qu’il est sage d’avoir du recul et de ne pas modifier les lois en fonction des humeurs ou des modes, mais en même temps, point trop n’en faut. Quand on voit les ­batailles qu’il a fallu mener pour autoriser l’avortement et la contraception, on mesure bien le décalage par rapport à l’évolution de notre société. Le droit rattrape la pratique. Et là, cela devient urgent. On n’empêche pas des couples de lesbiennes de se rendre en Belgique ou en Espagne pour pratiquer des ­assistances médicales à la procréation (AMP), on n’empêche pas des couples qui ont des problèmes de stérilité d’aller aux États-Unis ou en Grèce pour contracter des gestations par autrui, on n’empêche pas des couples d’homosexuels de s’arranger avec des amies et le contraire, ou d’adopter sans déclarer leur orientation sexuelle… Le fait de ne pas légiférer oblige au bricolage, à la fois juridique et pour répondre à un désir d’enfant.

 

Cette absence de législation perpétue également les discriminations puisque seuls les couples hétérosexuels stériles ont accès aux assistances médicales à la procréation…

Jean-Marie Bonnemayre. Le désir d’enfant est légitime dans notre société. Mais il ne semble pas l’être pour les couples de lesbiennes ou homosexuels. On accompagne les couples hétérosexuels mais pas les autres, c’est une discrimination, oui.

 

Au-delà du mariage, ces nouvelles familles n’interrogent-elles pas 
aussi les liens qui fondent le couple et la filiation ?

Jean-Marie Bonnemayre. Oui, et là, on touche des éléments sensibles, car cela remet en cause le dogme de la parenté classique homme-femme et avec un lien biologique. Or, au XVIIIe siècle, l’âge moyen de la mortalité des femmes était de trente-quatre ans, notamment en raison des décès en couches après des maternités successives. Celui de la mortalité moyenne des hommes était aux alentours de cinquante-quatre ans. Ces derniers reprenaient une deuxième, voire une troisième femme pour pouvoir élever les enfants du mariage ou de l’union précédente. C’était, de fait, des familles recomposées. Il n’était pas rare qu’un père ou un oncle élève les enfants. Après la Première Guerre mondiale, ce sont les femmes qui ont reformé des couples après la mort de millions d’hommes. Les familles recomposées ont donc toujours existé. Le seul élément nouveau depuis trente ans, c’est l’allongement de la durée de la vie qui permet la construction de familles successives.

 

Sans législation, ne laisse-t-on pas aussi des enfants et des familles dans des situations de non-reconnaissance et de discrimination, sans les protéger les uns des autres ?

Jean-Marie Bonnemayre. Oui, à tout moment il peut y avoir un décès ou une séparation. Il faut des garanties pour maintenir la relation affective entre l’adulte restant et le ou les enfants. C’est la question de la reconnaissance du parent social dans les familles recomposées. Les enfants doivent connaître leurs origines et être en sécurité.

 

Avec le mariage pour tous, l’Église perd aussi son dernier bastion, 
le couple et la famille…

Jean-Marie Bonnemayre. Oui, cet été, je suis tombé sur d’anciens débats parlementaires au sujet de la loi ­visant à légitimer les enfants naturels et adultérins. Un certain Léonce de Castelnau, député de l’Aveyron, disait de cette loi en 1908 : « Elle livre, sans aucune défense, la famille légitime à l’invasion des enfants nés d’un autre lit qui viennent se mêler désormais aux enfants légitimes par l’effet d’une vraie polygamie… » Je me suis dit, ce n’est pas possible, 130 ans après, on nous ressert exactement la même sauce. Ce qui est en jeu, c’est l’hypocrisie, qui est en train de tomber. Ce n’est pas autre chose. L’attitude constante de l’Église était de maintenir une façade présentable. L’Église tolérait les charivaris ou les carnavals. Les gens avaient le droit de se défouler, y compris sur le plan sexuel. C’était, pour beaucoup de femmes, l’occasion de résoudre le problème de la stérilité de leur mari. Les femmes dites stériles allaient, quant à elles, se frotter à des rochers qui comme par hasard avaient des formes de phallus. Elles pouvaient ensuite justifier d’être tombées enceintes juste après ! L’Église pouvait encore tenir les esprits et les couples.

 

Aujourd’hui, un enfant sur deux est né hors mariage, un enfant sur cinq vit dans une famille monoparentale, un enfant sur neuf vit dans une famille recomposée. Comment expliquez-vous néanmoins que l’idée de famille reste aussi importante ?

Jean-Marie Bonnemayre. Il y a un besoin de famille car elle est un soutien en temps de crise. Mais ce qu’on sait, c’est qu’il n’y a pas de modèle familial, c’est ça, le problème de fond. La famille aujourd’hui séduit parce qu’elle n’est plus patriarcale, elle est plus égalitaire et sans obligations, ni contraintes trop fortes. La famille se vit sans carcan, sans se faire au détriment des individus. Et ce n’est pas le mariage pour tous qui va détruire la famille, mais plutôt le système ­capitaliste et l’organisation du travail. Est-ce que les trois ou quatre millions de personnes qui travaillent en horaires décalés et fractionnés peuvent mener une vraie vie de famille ? Est-ce qu’elles peuvent voir leurs enfants comme elles le veulent ? Et où sont les crèches pour les familles monoparentales dans les quartiers populaires ? Ce sont toutes ces questions qu’il faut poser aujourd’hui avec ces nouvelles parentalités et ces nouvelles filiations.

 

Le premier ministre Jean-Marc Ayrault a précisé que le mariage et l’adoption pour les couples homosexuels seront votés mais pas l’ouverture à l’assistance médicale à la procréation (AMP) pour les lesbiennes. Qu’en pensez-vous ?

Jean-Marie Bonnemayre. Nous le regrettons. Nous vivons la même absurdité qu’à l’époque de l’avortement en France. Avant 1975, des femmes allaient en Angleterre pour se faire avorter. D’autres se rendent en Belgique ou en Espagne pour obtenir une AMP. Le parallèle est saisissant. Madame Bertinotti, ministre de la ­Famille, et madame Taubira, garde des Sceaux, nous avaient pourtant semblé sensibles à ces arguments. Mais nous savons que tout est question de rapport de forces à l’intérieur même du Parti socialiste. Ceux qui veulent une loi minimale auront peut-être le dernier mot. C’est très regrettable car personne ne croit à une modification du texte dans la suite du quinquennat. Il faut mettre tout à plat dès maintenant. Le texte sera ensuite amendé et retravaillé pendant plusieurs mois. C’est pour cela que nous organisons des colloques jusqu’au printemps.

 

Quelles sont vos revendications ?

Jean-Marie Bonnemayre. Nous souhaitons que soit permise l’adoption aux couples concubins et pacsés. Un accès égal aux techniques de l’assistance médicale à la procréation pour toute personne ou tout couple présentant un projet parental cohérent. De mettre fin à la discrimination exercée sur les candidats à l’adoption au seul motif de leur orientation sexuelle. La mise en place d’un statut pour les parents sociaux mais aussi la possibilité de l’adoption plénière par le second parent qui protège l’enfant en cas de décès du parent légal. Nous souhaitons également obtenir la reconnaissance de la multiparentalité et de la coéducation. Cette affaire ne doit pas être du seul ressort des associations gays et lesbiennes. Ces problématiques concernent l’ensemble de la société. Le pacs, qu’on pensait d’abord fait pour les couples homosexuels, est contracté à 90 % par des couples hétérosexuels.

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